Le photographe capture les ruines comme on file une métaphore sur la fragilité des certitudes. Il publie aux éditions Xavier Barral un essai photographique sur ses voyages en Méditerranée. Une exposition suivra à la rentrée, à Paris.
Trente années durant, de 1991 à 2019, le photographe d’origine tchèque Josef Koudelka, a sillonné le pourtour méditerranéen. De l’Italie au Maroc, en passant par la Libye, le Liban, la Jordanie ou Chypre, l’artiste a en ligne de mire les ruines des principaux sites archéologiques de la région. Temples antiques, théâtres gréco-romains, mosaïques, basiliques et autres statues de dieux ou de déesses apparaissent, comme par effraction souvent, dans des paysages qui nous sont familiers.
Le choix d’utiliser des panoramiques, présentés parfois à la verticale, dans une alternance de vues d’ensemble et de plans rapprochés, donne une vision subjective et délibérément fragmentaire d’un réel qui commence alors à nous intriguer. « De fait, commente Héloïse Conesa en avant-propos du livre, il ne s’agit plus seulement pour Koudelka de présenter des paysages de ruines mais des paysages en ruine qui exhalent une forme de désolation à lire comme une métaphore des désastres de l’Histoire ». En choisissant d’ailleurs de conclure le livre sur des photos en provenance de Palmyre en Syrie ou de l’ancienne ville de Troie située dans la Turquie actuelle, Koudelka nous rappelle combien la beauté radieuse de ces sites devenus mythiques a toujours peu ou prou côtoyé la violence de la guerre.
Accompagnée ici d’extraits de textes d’auteurs antiques ou modernes, cette série qui regroupe près de 170 photographies en noir et blanc est le fruit d’une donation consentie par l’artiste en faveur du département des Estampes et de la Photographie de la Bibliothèque nationale de France, où elle sera exposée à la rentrée dès le 15 septembre. Une merveille !
Josef Koudelka, Ruines, éditions Xavier Barral / Bibliothèque nationale de France, p.185
Olivier Rachet