Maroc Blues

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Inconditionnel amateur de jazz et artiste peintre iconique, Fouad Bellamine assure le commissariat de «Blue Note» à l’espace Artorium. Une exposition à travers laquelle il entend contribuer à nourrir une culture visuelle en déshérence. Avec son franc-parler, l’artiste livre une vision peu amène de son époque.

Des notes de jazz flottent dans l’air, se mêlant subtilement aux volutes de cigarette. Dans son atelier de Hay Ryad à Rabat, une atmosphère chaleureuse enveloppe et invite à la contemplation. « Je ne vis qu’avec les tableaux des autres », apostrophe l’artiste Fouad Bellamine. Chaque pièce, chaque œuvre, parmi la centaine accrochées au mur, possède son histoire et, dit-il, « permet de prendre du recul par rapport à mon travail ». Cet espace hors du temps semble incar- ner sa pensée et sa volonté féroce de « donner à voir et d’éduquer l’œil ». Un mantra au cœur de sa réflexion de curateur pour l’exposition « Blue note » où « le bleu peut être la couleur dominante, mais également une annotation dans une œuvre ».

Youness Atbane, European Platform, tirage impression digigraphie sur papier coton, 150 x 100 cm
Mustapha Boujemaoui, Pictojournal, 1991, acrylique sur papier journal, 58 x 79 cm

Conçue comme la partition d’un morceau improvisé de Art Blakey and The Jazz Messengers que Bel- lamine admire, l’exposition fait dialoguer de façon souvent inattendue des artistes modernes et contemporains. Prenant parfois le risque de la « cacophonie », selon le mot du curateur, la scénographie conçue par Fatime Zahra Morjani laisse libre cours à des rapprochements intergénérationnels détonants. Quand les toiles de Kacimi, Cherkaoui ou Ghar- baoui rencontrent les photographies de Samarkand de Zineb Andress Arraki ou les bleus éclatants de Fatiha Zemmouri, c’est tout le corps du spectateur qui se met alors à vibrer. Les arts plastiques, une question de rythme, semble nous suggérer ce grand connaisseur de l’histoire de l’art, qui en connaît un rayon en matière de synesthésies.

 

«Blue Note», Espace d’art Artorium, Casablanca, jusqu’au 31 mars 2019.

 

Retrouvez l’article en intégralité dans le numéro 47 actuellement en kiosque