[Work in progress] Amine Oulmakki : Sommes-nous tous des ânes ?

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Un âne citoyen ? Il fallait y penser. Il faut dire qu’Amine Oulmakki s’y connaît en matière de mises en scène, le plus souvent burlesques et insolites. C’est en suivant une formation de danse contemporaine que l’idée lui est venue. Rehausser le prestige d’un animal trop souvent raillé ; quand il ne constitue pas tout simplement, en arabe dialectal notamment, l’insulte suprême. À l’occasion de cette formation, le photographe et vidéaste s’amuse alors à gesticuler et à braire justement comme un âne ! À l’image des fabulistes, il décide d’anthropomorphiser celui que l’on a coutume d’appeler au Maroc « le 4X4 des montagnes ». L’obtention d’une bourse accordée récemment par la Fondation Heinrich Böll, en partenariat avec Le Cube, dans le cadre du concours Capturer les transformations en Afrique, le pousse à réfléchir à différentes séries photos dans lesquelles, revêtu d’un masque d’âne, un homme déambulant entre Rabat et Casablanca serait aux prises avec différentes formes d’incivilités quotidiennes.

Courtesy de l'artiste

Patatras ! le confinement arrive et voilà notre photographe contraint de cesser ses repérages en extérieur, comme il a coutume de les mener pour ses différents projets. Il se retrouve, comme nous tous, à la maison, en famille, en compagnie de ses deux enfants en bas âge : Raffi et Isli. Une première série, publiée quotidiennement sur Instagram, voit alors le jour, où l’on retrouve notre homme-âne confiné, aux prises avec les gestes les plus banals et les situations les plus quotidiennes : changer une ampoule, faire ses courses ou la sieste, ou bien donner un baiser à son enfant. Il s’agit, nous précise le photographe, « de se créer un espace de liberté chez soi » et « un peu de poésie au sein de notre appartement ». Les enfants adorent et se prêtent volontiers aux mises en scène de leur père. Quant au spectateur, il n’est pas loin de se reconnaître dans le visage si beau et si dérisoire à la fois de cet âne citoyen. Ou comment continuer de tisser du lien social, en s’amusant…

Olivier Rachet