Quel genre de collectionneur êtes-vous ?
Je ne suis pas collectionneur au sens de celui qui accumule. Je n’ai jamais eu d’esprit de spéculation. J’ai commencé par acheter sans ligne directrice, jusqu’à ce que je m’oriente vers la ville de Saint-Louis. Avec l’aide de Joëlle Le Bussy (Galerie Arte), j’y ai fait venir des artistes, organisé des résidences avec d’abord des peintres, Viye Diba, Souleymane Keita et le sculpteur américain Mel Edwards.
Il y a une dizaine d’années, j’ai aussi reçu en résidence des artistes marocains, comme Mohamed Mourabiti, Mounat Charrat et Saâd Tazi, dans le cadre de Jam Salam, avec l’appui de Mouna Kadiri. J’avais envie de contribuer à la renaissance de la ville de Saint-Louis, cité magique, pôle de créativité, avec une histoire particulière, naturellement métisse.
Qu’est-ce qui vous intéresse dans l’art contemporain africain ?
Au début, j’étais dans une forme d’éclectisme. J’ai beaucoup été accompagné par Joëlle Le Bussy et Marème Malong. Aujourd’hui, je me recentre sur la photographie, avec l’ex- pertise de Salimata Diop. Il m’arrive de « dérailler » pour une pièce exceptionnelle comme celle d’Ousmane Sow, mais sinon je suis orienté photo en Afrique. Nous avons des étoiles : David Uzochukwu, Malika Diagana, Laeila Adjovi ou Joana Choumali, qui a récemment obtenu le Prix Pictet.
On a beaucoup parlé de la photo malienne, mais peu de la photo sénégalaise, et saint-louisienne en particulier. J’ai voulu rétablir un peu l’histoire vraie, en exposant les précurseurs qui ont exercé dès le début du XXe siècle – comme le saint-louisien Meïssa Gaye, né en 1892 –, donc avant même la naissance de Seydou Keita en 1921. Aujourd’hui l’Afrique de l’Ouest a les moyens de se positionner sur le marché de la photographie internationale. Chacun doit apporter sa contribution, et cela, c’est la mienne. C’est le même principe que le Forum de Saint-Louis, qui pose la question de ce que l’Afrique peut apporter au monde. Une meilleure exposition d’abord, une meilleure connaissance ensuite.
Quels sont les jeunes artistes que vous suivez de près ?
Ceux qui ont été mes étudiants dans la vie (Amadou Diaw est le fondateur du Groupe ISM, ndlr) : Omar Victor Diop, Layepro… Il y a aussi David Uzochukwu, un métis d’origine nigériane qui a réussi à s’imposer à travers le monde. Rien que dans la ville de Saint-Louis, je découvre beaucoup de jeunes de valeur. J’ai toujours peur des effets du star system et je refuse d’entrer dans l’algorithme du monde de l’art. Donc je préfère penser que je tomberai par hasard sur la pépite.