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[ FOIRE 1:54 ] entretien avec Touria El Glaoui « L’art africain est une très bonne affaire »

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Traverser l’Atlantique pour rejoindre New York, c’est la nouvelle aventure de 1:54. Dès l’ouverture, la foire d’art contemporain africain a attiré de grands noms de la scène new-yorkaise. Sa directrice revient sur l’événement et sur la particularité du marché américain.

 

Après deux éditions à Londres, cette édition inaugurale à New York semble être une évolution naturelle pour 1:54. Comment le projet s’est-il concrétisé ? 

Nous pensions à New York depuis la première édition en 2013 à Londres. Cette première année avait enregistré un franc succès avec 6 000 visiteurs et 16 galeries. Deux galeries avaient déjà émis le souhait d’aller à New York sous l’emblème 1:54. Puis nous avons reçu un grand nombre de candidatures de galeries pour participer à l’édition suivante. La deuxième année, j’ai voulu présenter une édition solide avant d’aborder le marché américain. Là encore, le succès fut au rendez-vous avec un véritable engouement des visiteurs et des galeries. Les deux capitales du monde sont New York et Londres, et la Frieze Art Fair (en marge de laquelle se tient la 1:54, ndlr) attire 60 000 personnes. Nous sommes sûrs de capter au moins un pourcentage de ces amateurs d’art des deux côtés de l’Atlantique – d’où notre présence aujourd’hui à New York.

 

Comment avez-vous choisi Pioneer Works, un espace d’art contemporain du quartier Red Hook à Brooklyn ? 

Nous avons visité plusieurs espaces, notamment dans le nord de Manhattan, à Harlem, où de nombreux centres dédiés à l’art africain existent déjà. C’est plus facile d’accès et nous aurions pu envisager des collaborations avec les musées, mais l’émotionnel l’a emporté. J’ai eu un coup de coeur pour Pioneer Works, ce vaste centre d’art qui offre des programmes très avant-gardistes. Parmi tous les espaces visités à New York, c’est le seul à être une destination à part entière. À Londres, 1:54 se tient à Sommerset House, un très beau bâtiment néoclassique. Au-delà d’une foire, notre intention est de faire de 1:54 une véritable expérience. 

 

Pourquoi la foire est-elle limitée à seize galeries ? 

À Londres nous avions 17 espaces la première année, 27 la seconde et nous serons à 35 cette automne. À Londres comme à New York, nous veillons à offrir une sélection de qualité et à préserver cette dimension humaine que les collectionneurs apprécient tant. Ils peuvent visiter la foire en une heure et demie et prendre un café. En réalité, ils prennent plaisir à rester trois ou quatre heures, discuter avec les artistes et découvrir leurs œuvres. 

 

En quoi le marché américain se distingue-t-il de l’anglais ?  

Pour les Américains c’est nouveau, comme à Londres la première année. Ils aiment beaucoup la fraîcheur de notre proposition et y réagissent de manière plus directe. Avant de faire une acquisition, les collectionneurs européens ont besoin de savoir qui est l’artiste, comment son travail a évolué, où il s’est produit, dans quelle collection son oeuvre s’est vendue… Ici les acheteurs sont aussi plus jeunes, on retrouve notamment les hipsters de Brooklyn. Avec des prix abordables, 1:54 représente pour eux une excellente opportunité. Ils peuvent suivre leur artiste, le voir évoluer au fil du temps et mieux comprendre ce marché. Ce sont des investisseurs que l’on ne trouve pas à Londres. Pour les galeries, c’est aussi exceptionnel d’avoir cet accès direct aux collectionneurs.

 

BBC titrait justement en 2013 « Pourquoi l’art africain est-il la prochaine bonne affaire ? » Aujourd’hui, est-ce toujours une bonne affaire ?

Oui, c’est encore abordable, avec des prix stables. Notre objectif est de voir les Africains acheter leur art. Nous ne voulons pas qu’ils se réveillent un jour et se rendent compte qu’il est trop tard. Nous en parlons de Dakar au Cap. Nous voyons apparaître quelques blue chips (terme emprunté au monde de la finance, désignant les actions qui sont des valeurs sûres, ndlr). Peter Clark en est un exemple, avec des œuvres cotées à 50 000 dollars. À la Frieze, c’est le prix plancher. L’art africain est donc toujours une très bonne affaire (rires). Les collectionneurs le savent et sont à l’affût du prochain Basquiat. Ils veulent faire des acquisitions à bas coût et voir leur cote monter. Ils sont prêts à prendre des risques, à acheter des choses qu’ils aiment et qui prendront de la valeur.

 

Comment fonctionnent les collaborations avec les différentes plateformes marchandes, notamment Artsy et Frieze ? 

Artsy nous aide beaucoup. Nous partageons nos listes de collectionneurs VIP. Nous avons aussi des collaborations avec les musées. Quant à la Frieze, nous avons bénéficié de leur soutien dès le début. Nous sommes sur leur programme VIP. Ils nous recommandent aussi sur leur site web dans la liste des choses à faire. Lors de notre première édition, nous avions surtout des collectionneurs amateurs d’art africain. Aujourd’hui, 80% de nos acheteurs sont des collectionneurs de Frieze, donc principalement d’art contemporain, qui nous découvrent dans leur circuit. 

 

Propos recueillis par Salima Yacoubi Soussane 
Si vous souhaitez lire la suite de cet article vous le trouverez dans le numéro de juin 2015 Diptyk #29

Omar Victor Diop, Frédérick Douglass, 2015, impression jet d’encre pigmentaire sur papier Harman By Hahnemuhle, 90 x 90 cm
Omar Victor Diop, Frédérick Douglass, 2015, impression jet d’encre pigmentaire sur papier Harman By Hahnemuhle, 90 x 90 cm
© Alia Ali, courtesy Galerie Siniya28
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La terre et le bateau échoué, lac Kivu, Rwanda, tirage glossy fine art, 2015
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Bakary Emmanuel Daou, Le Temps Ebola, 2014 (Mali)
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Keith Haring, Sans titre, 1989. Courtesy Artcurial
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peinture de Khadija Tnana sur les murs de la prison du Méchouar, Tanger.
peinture de Khadija Tnana sur les murs de la prison du Méchouar, Tanger.
Leila Alaoui 1982 - 2016
Leila Alaoui 1982 - 2016
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