Redéfinition des stratégies des maisons de ventes, développement des musées, course aux chefs-d’oeuvre et nouveaux seuils de prix: décryptage des grandes tendances qui bouleversent le marché de l’art, sur la base du dernier bilan mondial établi par Artprice.
Le monde des enchères a toujours eu quelque chose d’exaltant. Il y a, bien sûr, au-delà de la logique économique de toute adjudication, l’adrénaline des enchères. Il y a surtout l’enthousiasme et la passion, l’attraction immatérielle qu’exercent les oeuvres d’art sur notre imagination et sur notre conscience. Un pouvoir d’attraction tel que le Louvre attire plus de 8 millions de visiteurs par an… Si la passion des uns nourrit la logique économique des autres, la rencontre de ces deux mondes est aussi capable de bouleverser les repères du marché de l’art. Il en fut ainsi à la fin de l’année 2017, qui restera à tout jamais une année marquante dans la longue histoire des enchères. Le grand bouleversement tient en un seul coup de marteau, établi le 15 novembre 2017 chez Christie’s à New York, avec la vente de la dernière oeuvre de Léonard de Vinci encore en mains privées. Le jour J, les enchères ont démarré à 70 millions $. Pour la première fois, des collectionneurs se sont battus à coups de surenchères de 20 ou 30 millions de dollars… L’oeuvre s’est arrêtée à 400 m$ après 19 minutes sous haute tension. Le prix final du Christ sauveur, le Salvator Mundi, mesurant 65 sur 45 centimètres et peinte autour de 1500 par Léonard de Vinci, s’élève à 450,3 millions $ en incluant les frais acheteurs et les diverses taxes. Un record absolu, un ordre de prix encore inouï quelques mois plus tôt, un sommet sans mesure avec le précédent record mondial qui culminait à 179,3 millions $ pour Les Femmes d’Alger (Version O ) de Pablo Picasso, vendu en mai 2015 par Christie’s. Derrière ce prix époustouflant, il faut lire une reconfiguration géopolitique de l’attractivité culturelle.