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L’enfant terrible de la peinture

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Avec son habituel esprit de dérision, Anuar Khalifi s’attaque à l’histoire de l’art dans une exposition où il déconstruit les stéréotypes.

« Les Arabes, on les trouve dans les musées d’histoire naturelle, pas dans les musées d’art ! » s’exclame Anuar Khalifi. On connaissait ses illustrations et ses dessins parodiques ; on découvrira un peintre hanté par les falsifications de l’histoire de l’art, plus iconoclaste qu’on ne l’aurait pensé. Pour cette exposition au titre surréaliste « Dust, roses and cockroaches », Khalifi se propose de déconstruire une histoire officielle de la peinture. « La peinture a beaucoup de secrets » explique-t-il, en se référant à deux peintres espagnols dont l’influence se fait sentir dans la plupart des oeuvres exposées. Vélasquez, tout d’abord, dont Khalifi propose une relecture du portrait de Juan de Pareja, son esclave maure qu’il aurait affranchi après lui avoir tiré le portrait. OEuvre mineure dans la vie de l’auteur des Ménines, ce tableau préparatoire au portrait du pape Innocent X raconte aussi une histoire trouble de domination. Goya s’invite aussi dans l’atelier de Khalifi, qui dit s’être inspiré du Dos de mayo, pendant moins connu du Tres de mayo, dans lequel les véritables martyrs seraient, selon le peintre, les mamelouks auxiliaires des Français, bien plus que les Espagnols. Les clichés ont la vie dure, suggère celui qui considère que « l’orientalisme a fait beaucoup de mal à la peinture. »

 

PLUS INQUIET QU’IL N’Y PARAÎT

 

Son trait le rapproche parfois de l’art naïf : prédilection pour des aplats de couleurs vives, flashy – « pas très élaborées et agressives », reconnaît l’artiste, notamment dans ses dessins –, absence de perspective, trivialité des motifs, empruntés le plus souvent à la culture populaire. Mais sa maîtrise de la parodie et de l’art du détournement évoque plutôt les pochades dadaïstes ou surréalistes. Depuis la parution en 2014 de son petit livre jaune I’m sorry I was young and dumb, dans lequel on croisait des moutons avec des têtes de mort, des costumes de super-héros étendus sur un fil à linge ou des autoportraits de l’artiste « dancing alone », on imaginait Anuar Khalifi en éternel adulescent. On appréciait l’ironie de celui qui se jouait des fantasmes occidentaux transformant tout musulman en terroriste potentiel, tout adolescent vêtu d’un survêtement et d’une paire de claquettes-chaussettes en dangereux délinquant. On découvre aussi, dans les nouveaux locaux de la Galerie Shart, un artiste plus inquiet qu’il n’y paraît, hanté par un monde qui semble avoir perdu parfois la boussole.

Sylvestre Kaballa, Sans titre, c. 1950, huile sur papier, 38,5 x 52,5 cm
Sylvestre Kaballa, Sans titre, c. 1950, huile sur papier, 38,5 x 52,5 cm
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