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Othmane Dilami : Le monde était sa maison

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Il y un an disparaissait tragiquement ce jeune photographe discret, au talent prometteur. Diptyk lui rend hommage en dévoilant son parcours et des images inédites. 

 

Modeste, exigeant, baroudeur, déterminé. C’est par ces mots que ses proches évoquent le souvenir d’Othmane Dilami, un rebelle au coeur tendre et au caractère bien trempé. Fauché par un accident de moto en novembre 2016, il était alors en Inde pour un reportage sur les origines de la musique trance Goa, ce courant électronique aux accents organiques, influencé par la musique tribale et orientale. Ses appareils et ses photos ont disparu ce jour-là avec lui. Mais ses archives, conservées par ses parents et amis, permettent aujourd’hui de retracer le parcours d’un jeune créateur qui avait trouvé sa voie. À l’heure des premiers choix, Othmane Dilami hésite entre les beaux-arts et l’architecture. Après une prépa artistique à Paris, il part étudier le photojournalisme à Dublin, davantage pour « rassurer » ses parents que pour faire carrière. Othmane est le fils unique des journalistes Nadia Salah et Abdelmounaïm Dilami, fondateurs du groupe de presse Éco-Médias. Il passe alors quelques temps à Atlantic Radio, où il signe quelques reportages et égrène à l’antenne les cours de la bourse. Mais l’étiquette du « fils du patron », très peu pour lui. « Il ne supportait pas cette image, se souvient son ami d’enfance Thierry Del Valle. Sa vie, c’était la photographie. Il voulait vivre de sa passion pour prouver à ses parents qu’il pouvait le faire. Son rêve était d’aller jusqu’au bout, de faire les choses comme personne d’autre. » Il plaque alors tout pour étudier la photo et l’histoire de l’art à Montréal, dans le prestigieux Collège Marsan. Là-bas, il abandonne le numérique pour explorer les possibilités de l’argentique. Il force même la porte du studio de Sebastiao Salgado, dont il admirait la lumière, pour y faire un stage. Fasciné par le portrait, il embrigade ses amis dans ses propres expérimentations. C’est lors d’un retour à Casablanca qu’il réalise son « Hommage africain », inspiré par un vieux portrait d’acteur égyptien. Son ami Hamid pose coiffé d’un fez et affublé d’un masque traditionnel, pour mieux symboliser les liens entre Noirs et Arabes sur le continent. Voyageur dans l’âme, le monde était sa maison. À l’aube de ses 30 ans, Othmane Dilami avait déjà parcouru plus de quarante pays, souvent sans autre compagnon que son appareil photo. « Je ne suis jamais seul puisqu’il y a toujours des gens autour de moi, à rencontrer, à qui parler », disait-il à sa mère. Une habitude de la débrouillardise apprise chez les scouts marocains qu’il fréquentait enfant, où il a forgé son caractère indépendant et son désir d’aller vers l’autre. De la Nouvelle-Zélande à l’Amérique latine, en passant par l’Asie du Sud-Est, sa motivation était toujours la même : saisir des « paysages humains », selon le titre d’un livre qu’il aimait, celui du poète turc Nazim Hikmet. Retranscrire l’intensité du moment par un geste, un regard, c’est bien ce qu’a fait Othmane Dilami au Sénégal, lors d’un long voyage où il a photographié les lutteurs traditionnels. La figure humaine est toujours au centre de sa photo, qu’il s’intéresse aux costumes excentriques des jeunes gens au Japon, ou même à la zone désertée de Tchernobyl, qu’il avait visitée clandestinement.

 

Marie Moignard

 

Cet article est à retrouver intégralement dans le numéro 41 de diptyk 

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