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Portfolio : Si grand-mère me voyait, Phumzile Khanyile

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La jeune photographe sud-africaine se met en scène dans la série Plastic Crowns, sorte de journal intime fictif où elle explore l’identité féminine. Présentée en 2017 à Paris Photo, aux Rencontres de Bamako ou encore à la foire 1-54 Londres et New York, son imagerie décalée n’en finit pas de séduire les institutions, jury et collectionneurs.

 

Par Jeanne Mercier

 

L’un des autoportraits évoque, avec un côté glamour moins papier glacé, les images iconiques du photographe de mode Guy Bourdin, où surgissent des jambes et des chaussures sans corps ni visages

 

Pendant deux ans, Phumzile Khanyile a pris pour terrain de jeu la maison de sa grand-mère à Soweto. Terrorisée à l’idée de sortir dans ce township de Johannesburg – il y a quelques années elle s’est fait agresser par cinq hommes pendant qu’elle prenait des photos en extérieur –, la jeune photographe a recréé en intérieur un monde superficiel en plastique, celui des fêtes et de l’alcool, pendant que sa grand-mère était à l’église. Les vêtements et accessoires de cette dernière deviennent les instruments de ses mises en scène. Pour la petite histoire, Nomvo (c’est le prénom de sa grand-mère) était loin d’imaginer ce que faisait sa petite-fille en son absence : elle a d.couvert Plastic Crowns lors de l’exposition de fin d’.tudes au Market Photo Workshop, où Phumzile Khanyile a pu étudier après avoir décroché en 2015 la bourse et le mentorat Gisèle Wulfsohn (du nom d’une photographe documentaire sud-africaine). Là, elle a bénéficié de l’encadrement et de l’influence d’Ayana V. Jackson (Etats-Unis), activiste visuelle qui combat les représentations associées au corps noir.

 

Dans son studio improvisé, Phumzile Khanyile met en scène son ennui et sa solitude. Mêlant une iconographie à la fois intime, enfantine et punk, ses images saugrenues – voire morbides – explorent une palette à la fois douce, floue et contrastée qui ne va pas sans rappeler les filtres Instagram. C’est en plaçant un voile devant l’objectif de son appareil numérique qu’elle obtient cet effet désuet. Ses autoportraits disent ses peurs, son envie d’émancipation, ses questionnements sur la condition des femmes en Afrique du Sud, sa sexualité, mais aussi la difficulté de faire face au monde. Ils constituent aussi une clef de lecture pour comprendre les changements d’esthétiques et de pratiques au sein même de la célèbre école Market Photo Workshop. Comme le souligne le critique sud-africain Sean O’Toole dans Artforum, les photos de Phumzile Khanyile rappellent « la maladresse des autoreprésentations frêles de Francesca Woodman et le fétichisme de Guy Bourdin – des noms que vous n’associeriez pas à cette école de photographie qui compte parmi ses diplômés Zanele Muholi et Jodi Bieber ».

 

Toutes les photos : série Plastic Crowns, 2016, impression numérique sur chiffon de coton. Courtesy Phumzile Khanyile & Afronova Gallery

 

Portfolio à retrouver en intégralité dans diptyk n°43 en kiosque

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