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Pourquoi l’architecte burkinabé Francis Kéré a remporté le Prix Pritzker

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C’est le prix le plus prestigieux en architecture. Le Prix Pritzker a été décerné, le 15 mars dernier, au Burkinabé Francis Kéré qui, à 56 ans, devient le premier architecte africain à recevoir cette distinction. Francis Kéré a réalisé de nombreux projets en Afrique dont il modernise les techniques traditionnelles. Le jury a salué son engagement pour une architecture responsable: “Il soulève des questions fondamentales sur la durabilité des constructions dans un contexte de changements technologiques constants.” Mais qui est Francis Kéré ? Portrait en 5 créations emblématiques :

Photo courtesy Erik Jan Owerkerk

#1 École communale de Gando (Burkina Faso)

Si à l’âge de 7 ans Francis Kéré quitte Gando faute d’établissement scolaire dans le village, l’architecte reste profondément attaché à sa communauté pour qui il construit, en 2001, la première école communale. Francis Kéré se réapproprie les matériaux locaux, la tôle ondulée et l’argile “disponible en abondance dans la région et traditionnellement utilisée dans la construction des maisons”. Mais l’architecte innove : « j’ai fait un bâtiment moderne qui n’est pas occidentalisé mais qui n’est pas non plus un bâtiment traditionnel africain », se défendait-il en 2018 dans la revue spécialisée Dezeen. À l’argile il ajoute du ciment pour améliorer la qualité des briques, plus résistantes aux pluies diluviennes de la saison humide. Il surélève le toit en tôle  – qui protège des pluies mais absorbe toute la chaleur du soleil – et ajoute un plafond en briques d’argile perforées pour créer “une structure bien ventilée, qui fonctionne sans aucun contrôle climatique artificiel ou mécanique ». Ce premier projet, véritable rampe de lancement pour le jeune architecte,  lui vaudra le prix Aga Khan d’Architecture en 2004 et le Global Award for Sustainable Architecture en 2009.

Photo courtesy Iwan Baan

#2 Pavillon de la Serpentine Gallery (Londres)

Chaque année depuis 2000, la Serpentine Gallery de Londres prend ses quartiers d’été dans les jardins de Kensington et commande pour l’occasion un pavillon temporaire à un architecte de renom invité à expérimenter. En 2017, elle choisit Francis Kéré.  S’inspirant du grand arbre de sa ville natale de Gando sous lequel les membres de la communauté se réunissent, le design de Kéré, ouvert sur l’extérieur, est pensé pour connecter les gens. Son toit sous forme de canopée incurvée, récolte l’eau en son centre en cas de pluie “soulignant que l’eau est une ressource fondamentale pour la survie et la prospérité de l’homme”. Cette eau de pluie est ensuite utilisée pour irriguer les jardins. Pour l’architecte, “la nature est un leitmotiv” dans ses créations.

Photo courtesy Iwan Baan

#3 Sarbalé Ké, au Festival Coachella (Californie)

Une fois de plus, Kéré s’inspire de son Afrique natale. En 2019, pour le Festival de musique et d’art Coachella, il conçoit l’installation Sarbalé Ké (« Maison de la fête » en langue Bissa du Burkina Faso) inspirée du baobab. Ces 12 tours temporaires rendent, ici, les frontières poreuses entre architecture et design. Avec ces motifs géométriques, Kéré revendique « une vision afro-futuriste » qui, avec son approche durable et inclusive, constitue sa signature.

Courtesy Kéré Architecture

#4 Nouvelle Assemblée nationale du Burkina Faso (projet non finalisé)

En 2014, les Burkinabès renversaient le président Blaise Compaoré au pouvoir depuis 27 ans. Durant ce soulèvement populaire, l’assemblée nationale a été incendiée. Sollicité par la société civile, Francis Kéré dessine un nouveau bâtiment sous forme de pyramide rappelant les Ziggourats mésopotamiennes. Ici encore, l’architecte puise ses références en dehors du corpus occidental. « Nous ne pouvons pas continuer à faire une copie pas cher de l’Ouest. Nous devons construire des bâtiments qui parlent et inspirent notre peuple », expliquait-il à l’AFP en 2015. Un escalier extérieur sur l’une des façades permet aux citoyens d’accéder à des terrasses végétalisées qui surplombent la ville, clin d’œil à l’importance de l’agriculture au Burkina Faso. Pensé comme un forum, cet escalier permet aux Burkinabés de s’approprier l’espace et, symboliquement, le processus démocratique. Un “arbre à palabres” traverse la toiture, motif récurrent dans les réalisations de l’architecte qui se veulent inclusives.

Courtesy Kéré Architecture

#5 Le “Village Opéra” à Laongo (Burkina Faso)

Avec le “Village Opéra” de Laongo, Kéré réaffirme son engagement pour l’éducation et la culture au Burkina Faso. Il construit en 2010, 26 bâtiments bioclimatiques, à base d’argile et de granit – Laongo étant un vaste champ de granit également connu pour son festival de sculpture. Disposés en spiral, les bâtiments abritent aujourd’hui ateliers, centre de santé, maisons d’hôtes et école. Un théâtre de 700 places devait couronner ce projet initialement porté par le metteur-en-scène allemand Christoph Schlingensief qui rêvait, avant de mourir en 2010, d’un “opéra pour l’Afrique”.

Charles Bako – E.O

Photo à la Une : © Geoff Pugh/Shutterstoc
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