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À Marrakech, l’expo TATE brouille les frontières de la perception

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L’exposition collective There are treasures everywhere (TATE) redessine les territoires de l’intime et brouille les frontières de la perception. 

Le temps est comme suspendu pour les artistes en résidence à Jardin Rouge. À chacun et chacune, un espace est alloué : un antre où s’exercer à développer ses pratiques et laisser surgir les souvenirs les plus reculés. Tel est sans doute l’un des fils conducteurs de cette nouvelle exposition réunissant les artistes Roxane Daumas, Fatiha Zemmouri, Tania Mouraud et Maya-Inés Touam s’adonnant à des mediums très différents. La dernière prolonge la série de photographies intitulée Ready made, déjà distinguée par le LCC Program. Savantes compositions faites de bric et de broc où affleurent les objets les plus hétéroclites : objets traditionnels beldis ou accessoires les plus kitchs revisitant le motif de la nature morte avec une touche surréaliste de plus en plus affirmée. Maya-Inès Touam revendique sa double appartenance franco-algérienne et s’amuse à détourner, en jouant des effets de clair-obscur, les objets iconiques de son intimité. Fatiha Zemmouri pousse, de son côté, encore plus loin cette logique iconoclaste en exposant des reproductions agrandies de ses carnets intimes figés dans de la tôle auxquels elle fait subir les transformations les plus rudes : pliages, brûlures, déchirures. Une dialectique en trompe-l’œil où alternent les actes de création et de destruction dans la pure tradition alchimique. 

Fatiha Zemmouri, Carnet intime, 2019

Territoires dévastés

La photographe Roxane Daumas articule dans une série intitulée A part of trois mediums évoquant trois temporalités différentes : un polaroid propose le portrait d’un être ayant vécu un moment de rupture personnel auquel fait écho un dessin grand format à la pierre noire se référant au passé du conflit serbo-croate. Un tirage à la gomme bichromatée, retouché à la pierre noire, regarde en direction d’un impensable futur synonyme bien souvent de résilience. Les blessures intimes entrent ainsi en résonance avec le vécu même de chaque spectateur, troublé par l’indécision générique entre des dessins ultra réalistes et des photographies entretenant un flou qui serait l’image la plus fiable de nos mémoires intimes. Indécision atteignant sans doute son paroxysme dans la fresque murale de Tania Mouraud où se cache une phrase du Talmud ou dans des tapis composés avec des tisseuses de la région de Marrakech où les vers du poète René Char se glissent entre les interstices de la trame. Une exposition résolument tournée vers les empreintes laissées par la mémoire des corps et des sensations les plus intimes comme une invitation à méditer sur les disparitions qui toujours nous guettent peu ou prou. 

Olivier Rachet

Exposition There are treasures everywhere, avec Maya-Inès Touam, Roxane Daumas, Fatiha Zemmouri, Tania Mouraud, Résidence Jardin Rouge, Fondation Montresso, Marrakech, du 4 novembre au 3 décembre 2019. 

Roxane Daumas, A Part Of VRII, 2019, pierre-noire sur papier, 139,5-102cm
Maya Ines Touam, esquisse Ready-Made, 2019
Tania Mouraud, Wall, 2019
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