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Amine El Gotaibi : une invitation à ouvrir l’enclos

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Berger qui montrait le monde d’après la perspective de son troupeau de brebis en 2018, Amine El Gotaibi rempile avec «Perspective de séduction», une tentative de décrire et libérer des brebis captivées par un pouvoir pastoral.

Avec « Perspective de séduction », fruit d’une résidence de création in situ à Dar Moulay Ali, Amine El Gotaibi veut avant tout « explorer comment un pouvoir s’exerce sans violence, par la séduction ». Artiste engagé aux oeuvres volontiers politiques, il situe ce nouveau travail dans le prolongement de « Perspective de brebis », projet développé en 2018 à la résidence Al Maqam, à Tahenaout, dans lequel il proposait un monde du point de vue d’une brebis.

La brebis « symbolise la fertilité et la richesse. Elle est constamment exploitée : elle donne du lait, de la laine, met bas de nouveaux membres du troupeau », détaille l’artiste. Mais la brebis d’El Gotaibi est une créature paradoxale. Figure de l’obéissance et de l’assujettissement, elle manifeste également un désir d’affranchissement. Sur des panneaux métalliques, deux installations – Brebis Séduction et Phénix – illustrent ces paradoxes. Brebis Séduction représente une brebis prosternée, explique l’artiste, tandis que Phénix donne à voir « une brebis qui cherche à se libérer, sans complètement y arriver ». Alors que la toison de la première dépasse de peu l’oeuvre avant d’être interceptée par les ciseaux de l’artiste, le lainage de la seconde jaillit sur l’espace de l’exposition, irradie le patio de Dar Moulay Ali, faisant de l’affranchissement la première étape dans la construction d’une convergence.

La thématique de la résistance, secondaire mais omniprésente, se retrouve dans une installation de miroirs redirigeant un faisceau de rayons du soleil vers un recoin sombre, preuve qu’« il y aura toujours une lumière », dit El Gotaibi. Si la dimension de la séduction, pourtant centrale, donne parfois l’impression d’être éclipsée, elle ressort particulièrement dans certaines oeuvres. Un parfum de brebis, exposé dans un écrin rappelant l’univers de la haute parfumerie, en fait un objet de désir. Par cette pièce olfactive, Amine El Gotaibi dénonce la séduction comme voile et ornement, alors que cette dernière tenterait de perpétuer la condition grégaire de soumission en l’enjolivant. Une domination douce qui s’exerce sans violence, par le chant des sirènes… ou des bergers, dont les refrains seront diffusés dans l’espace d’exposition.

Reda Zaireg

Amine El Gotaibi, «Perspective de séduction», Dar Moulay Ali, Marrakech, du 22 février au 31 mai 2019.

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