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JEANNETTE BETANCOURT AU CUBE

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La Mécanique des fluides de Jeannette Betancourt

 

Artiste new-yorkaise originaire de Porto Rico, Jeannette Betancourt a fini par poser ses valises au Mexique dont elle arbore depuis la nationalité. Pointure outre-Atlantique, sans rapport avec ses homonymes Liliane ou Ingrid, elle a effectué sa première résidence au Maroc entre les murs du Cube de Rabat, pour une exposition raffinée et engagée sur le devenir des ressources liquides.

par Syham Weigant

 

 

En déambulant dans les grands boulevards de Mexico, on peut croiser les sculptures urbaines de Jeannette Betancourt, commandées par différentes institutions. Ce sont néanmoins ses interventions plus minimales et éphémères que l’artiste préfère, pour leur portée significative. Lauréate d’une bourse du Fonds National pour la Culture et les Arts du Mexique, elle choisit très tôt de travailler sur les problématiques liées à la nature, et entame un cycle de recherche sur l’eau.

 

L’exposition « Eau : Flux / Situations » découle de ses interrogations sur cette matière pure et transparente. Betancourt y propose des installations, vidéos et sculptures à la beauté éthérée mais qui soulèvent des questions socio-politiques cruciales : « les artistes contemporains mexicains sont très engagés. La plupart prennent position sur des questions sensibles comme le narcotrafic ou la prostitution… », confie l’artiste rencontrée pendant qu’elle installe ses pièces. La plus impressionnante est une pluie dense s’échappant du plafond, constituée de larges larmes en fine mousseline et à la transparence nacrée. Cette œuvre-phare nous interroge sur ces précipitations, notamment dans les Tropiques, que l’on n’arrive ni à conserver ni à recycler. Sur les boiseries quelques sculptures plus minimalistes, The business of purity, Sway et Message in a bottle : de petits icebergs en tissu, en référence à l’eau glaciaire mise en bouteille et vendue hors de prix dans les restos chics de New-York. D’étranges balanciers en plexi au contenu coloré, constitué de rebus récoltés sur la plage de Salé, qui disent le mouvement perpétuel des océans finissant par nous renvoyer nos propres déchets. Enfin sur une étagère on croit voir de vieilles bouteilles d’eau minérale usagée, aplaties, déformées. Ce sont en fait des sculptures en résine, dont la texture cristalline rend l’illusion parfaite.

Plus loin, différentes eaux sont réparties dans des flacons gravés de leur caractéristique : eau de mer, gazeuse, potable… Un jeu sur les transparences qui nous interroge sur la hiérarchie entre contenant et contenu. Comme pour le parfum, c’est finalement l’emballage qui donne de la valeur. Au sol, une installation en mousseline reproduit l’effet de la vibration ondulatoire d’une pierre jetée dans l’eau calme. Les ondulations sont cousues de différentes citations dont la profondeur conceptuelle et l’intérêt sont variables : on y retrouve autant Paris Hilton, que d’autres « philosophes » plus sérieux… Deux vidéos rappellent la manière dont les puissances hydrauliques ont longtemps été déifiées. Très abstraites, elles ont été tournées au large de la mer Egée sous l’orage, et évoquent notamment le combat de Xerxès, roi perse ayant perdu le contrôle progressif de l’Europe à cause de la puissance des flots. Un épisode déterminant dans la construction culturelle Orient/Occident.

 

Cette exposition foisonnante explore au mieux l’esthétique de cette matière familière et pourtant peu respectée : « L’eau est en même temps sacrée et un produit commercial » assène Jeannette Betancourt. Menacé par les modes de vie modernes, le nouvel « or bleu » est un élément « rarement calme qui préfère se déplacer d'un endroit à un autre, en changeant son état », pour mieux échapper aux périls dénoncés par l’artiste.

 

 

Jeannette Betancourt « Eau : Flux / Situations »

Jusqu'au 4 juillet

Le Cube, Rabat

Résidence de mai 2013

Dineo Seshee Bopapé, au fin fond de la Bahia, dans la dernière cour du palais, ne ratez par l’installation de cette artiste Sud-Africaine
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