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[Expo] Au MMVI, la rétrospective Fouad Bellamine conjugue espace, couleur et lumière

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Annoncée en mars dernier et reportée en raison de la pandémie, la rétrospective “Entrée en matière” parcourt 50 ans de création : des années 1970 où Bellamine découvre les peintres de l’École abstraite de Paris jusqu’à ses derniers travaux où les tons gris s’estompent au profit de roses aériens et virginaux. 

Commençons par dire un mot de la scénographie très réussie réalisée par Hakim Benchekroun. À l’étage du MMVI, un circuit chronologique évolue dans un espace resserré et labyrinthique, rappelant irrésistiblement la médina de Fès, ville natale de l’artiste, qu’une installation immersive en fin d’exposition reproduit de façon troublante.

Entre temps, le spectateur parcourt 50 ans de création : des années 1970 où tout droit sorti des Arts appliqués, Bellamine découvre les peintres de l’École abstraite de Paris, dont Poliakoff auquel les premières toiles font parfois penser ; aux années 1980 passées à Paris où le peintre explore le concept de muralité qu’il dit souvent avoir percé.

Fouad Bellamine, sans titre, 2008, technique mixte sur toile, 160 x 140 cm.

Trouer le mur : la scénographie s’y emploie d’ailleurs subtilement à travers l’érection d’un cube ou la percée d’une alcôve rappelant les motifs de l’arche, de la niche, du parallélépipède ou du marabout qui ne cesseront d’apparaître en creux sur les toiles, dans une dialectique éprouvée de l’effacement et du dévoilement.

Passion de peindre et quête mystique de la lumière semblent inséparables chez Bellamine comme le montrent magistralement des travaux plus récents où les tons gris s’estompent au profit de roses aériens et virginaux qui vous élèvent l’âme. Ne serait-ce que pour la dernière salle à l’accrochage ascensionnel, l’exposition vaut largement le détour !

Fouad Bellamine, Niche II, 1986, acrylique sur toile, 150 x 195 cm.

Mais derrière cette quête inextinguible de la peinture affleure aussi le portrait d’un homme à la fois humble et sensible. Humilité exigeante qui transparaît dans les entretiens vidéo qui ponctuent l’exposition co-curatée par Latifa Serghini et Bellamine lui-même, où l’on écoute ce dernier regretter, en art, le règne contemporain de l’individualisme. Sensibilité aux violences qui de Gaza à Beyrouth, en passant par Bagdad ou Casablanca, compromettent de tout temps la quête éperdue de la lumière et dont rendent compte des polyptiques où peinture et photographie se mêlent.

Fouad Bellamine, La tombe de Jilali, 2020, 146 x 114 cm chaque toile

Humilité enfin qui voit le peintre s’effacer, dans un geste ultime de révérence qui est l’apanage des grands, devant son compatriote Jilali Gharbaoui auquel deux magnifiques diptyques rendent en fin de parcours hommage. Gharbaoui auquel le MMVI consacre une exposition simultanée et qui fut au Maroc le pionnier d’une abstraction que Bellamine a réussi à faire rimer avec élévation. Le miracle de la peinture, probablement…

Olivier Rachet

« Entrée en matière », rétrospective de Fouad Bellamine, Musée Mohammed VI – Rabat, jusqu’au 20 avril 2021.
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