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[Expo] Avec Hassan Bourkia, chronique d’une intranquillité

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Pour sa nouvelle exposition intitulée « Au nom des miens », l’artiste Hassan Bourkia revisite une mémoire douloureuse et place son travail sous le signe d’une renaissance perpétuelle. 

« Ah ! Quand je parle de moi, je vous parle de vous ». Hassan Bourkia, dont l’exposition « Au nom des miens » inaugure la réouverture du Comptoir des Mines de Marrakech, pourrait faire sienne cette déclaration de Victor Hugo. Lui dont l’amour pour la littérature constitue l’un des fils conducteurs de cette exposition évoquant notamment les figures de Borges, d’Edmond Amran El Maleh, d’Ingeborg Bachmann ou de Juan Goytisolo. De l’intime, il est question tout au long du parcours : des souvenirs d’enfance aux drames familiaux, nombreuses sont les installations évoquant à travers des matériaux à l’état de décomposition – rouille, poussière, cendres – les différentes étapes de nos vies. Des goûters d’anniversaire sont représentés par une accumulation de baudruches en plastique et les adieux par une juxtaposition murale de boîtes à lettres calcinées sobrement intitulée Aller sans retour. 

Hassan Bourkia, ALLER SIMPLE, 2020, Installation murale, Technique mixte sur panneau.

Les titres des œuvres revêtent toujours chez Bourkia une forte charge émotive, comme autant de poèmes plastiques offerts à notre regard. En dépit des drames que l’on sent prégnants, le plaisir affleure parfois au détour d’une pièce comme dans l’installation Nuits d’amour composée de ressorts de matelas au centre desquels ont été déposées des ampoules que prolongent des fils électriques ne menant nulle part. Tout passe ; demeurent les souvenirs, fussent-ils tranchants comme dans la sculpture murale allégorique intitulée Temps qui rappelle la forme circulaire d’une horloge dont les aiguilles ont été remplacées par des lames de rasoir.

Hassan Bourkia, TRACE DE MA MÈRE, 2019 Diptyque, Technique mixte sur panneau, 100 x 204 cm. Signée et datée en bas à droite.

On retiendra pour finir un motif iconographique forgeant quasiment une mythologie personnelle : celui d’un éventail associé à la mère, mais dont la forme rappelle métaphoriquement les pages d’un livre ou les ailes d’un oiseau. Au détour d’un parcours qui s’achève avec une série de collages réalisés lors d’une résidence au Brésil, apparaît cette phrase salvatrice de la poétesse autrichienne Ingeborg Bachmann : « Tout homme qui tombe a des ailes », qui constitue peut-être la clé du travail de Bourkia. L’art, tel le Phénix, renaît toujours de ses cendres. Au final, c’est toujours la vie qui gagne, c’est-à-dire la mémoire. Ou pour le dire avec les mots de Borges : « L’oubli est la seule vengeance, le seul pardon ». 

Olivier Rachet

Hassan Bourkia, « Au nom des miens », Comptoir des Mines Galerie, Marrakech, jusqu’au 28 février 2021.

Visuel de couverture : Hassan Bourkia, LA MÉMOIRE DES INDÉSIRABLES, 2020, Installation, 180 x 400 x 20 cm – Exposition « Distance Ardente », Musée Régional d’Art Contemporain d’Occitanie – Saison Africa 2020.
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