
« L’objet traditionnel s’impose à l’œil moderne de par ses qualités esthétiques frappantes et claires. Les aspects autrefois ignorés par la culture académique sont aujourd’hui familiers à l’esthétique contemporaine : nos yeux sont mieux équipés pour les apprécier », écrivait en 1966 Toni Maraini dans la revue Maghreb Art. C’est précisément là où réside le point nodal de l’exposition « Maroc, une identité moderne » présentée à l’IMA Tourcoing qui orchestre un va-et-vient entre une vingtaine d’œuvres du Groupe de Casablanca et des objets vernaculaires prêtés par le Musée du Quai Branly et le musée Bargoin de Clermont-Ferrand. Des correspondances se tissent évidemment entre les motifs géométriques des fibules, tapis et tissus mis en miroir avec les œuvres de Belkahia, Melehi ou Demnati. Elles dévoilent avec beaucoup de pédagogie l’ambition qui a été celle de cette avant-garde que Mohamed Chabâa résumait laconiquement ainsi : « Le statut de l’art traditionnel au Maroc est futuriste ». Si certaines œuvres sont bien connues des amateurs marocains (dont certaines proviennent de collections privées marocaines), comme les peaux de Farid Belkahia ou les toiles suggestives Marie (1972) et Harmonie (1971) de Mohamed Hamidi, elles le sont beaucoup moins du public français. Tout l’intérêt est aussi là et participe d’une redécouverte à l’international de l’histoire de l’art marocaine post-Indépendance et plus généralement des arts non-occidentaux.
Emmanuelle Outtier