Comme ses initiales l’indiquent, sa galerie parisienne fondée en 1988 lui ressemble à 100%. Avec cette jeunesse des grands marchands, Jean-Gabriel Mitterrand s’est fait un nom dans l’art comme on se fait dans la vie.
Ayant participé à la création d’Artcurial dès 1975, Jean-Gabriel Mitterrand décide d’ouvrir sa propre galerie en 1988, rue Jacques-Callot à Saint-Germain des Prés. Il s’y consacre à la sculpture, depuis Rodin jusqu’à Niki de Saint-Phalle en passant par les Lalanne, Tinguely, Mitoraj ou encore Takis. A l’image de son temps, l’espace cultive une politique d’expositions originales sur lesannées 1960 et le Nouveau Réalisme. En 2003, JGM traverse la Seine pour s’implanter rue du Temple dans le Marais. Un déménagement qui marque une évolution dans ses choix d’artistes. Jusqu’alors spécialisée dans l’art du XXe siècle, sa galerie se tourne vers d’autres représentants plus contemporains issus d’une nouvelle génération, qui s’expriment aussi bien avec la sculpture et la peinture qu’avec les nouveaux médias : photo, vidéo, installation… (…)
diptyk : Que cherchez-vous chez les artistes que votre galerie défend ?
Jean-Gabriel Mitterrand : Chaque galerie a son histoire ; la mienne est attachée à certains artistes européens des années 1960. Disons d’un proche passé. Grâce à leur réputation, ma crédibilité s’est établie près de collectionneurs internationaux. Chemin faisant, j’ai renouvelé mes artistes. C’est une nécessité absolue. Lorsque je dis « renouveler », je veux dire en gagnant quelques années sur les artistes, leurs tranches d’âge, leur génération d’appartenance. En résumé, ceux qui auraient aujourd’hui 80 ans ont été remplacés par des artistes de 55-65 ans. Pas de 30-35 ans. Ce n’est pas le cœur de mon activité qui consiste plutôt à remettre en selle des artistes qu’on avait un peu laissé passer. (…)
En quoi réside l’intérêt des scènes émergentes ?
C’est d’abord le résultat, me semble-t-il, de ce qu’on appelle la mondialisation. Celle du marché de l’art… La place des artistes ayant considérablement augmenté sous cet effet. Y compris celle des artistes originaires des pays émergents dont l’économie fait peau neuve mais qui possèdent des cultures très anciennes. A l’instar du Maghreb, du Moyen-Orient, de l’Asie. Quant aux collectionneurs exclusivement concentrés sur Londres, New York, Paris, Berlin, ils intègrent davantage d’artistes des scènes émergentes qui portent une culture ancrée dans d’autres traditions et qui les subliment dans leur travail. Charles Saatchi est le premier à avoir entrebâillé la porte du marché à ces nouvelles énergies créatrices, avec ses expositions à Londres, sur l’art chinois, arabe, indien… Ce qui est excitant dans cet univers multiculturel, c’est le rapport en matière d’art contemporain qui s’instaure à l’égard du goût international, le plus souvent dicté par les grands collectionneurs, les grands musées, les grands marchands, les grands critiques. Dans ce club des artistes en devenir, il y en a de plus en plus d’Afrique du Nord, de Moyen-Orient, d’Iran, d’Asie…
Au-delà du mimétisme pour un Saatchi, comment l’ouverture du marché s’est-elle produite ?
C’est l’accès aux écoles d’art contemporain en Europe et aux Etats-Unis, pour les étudiants des pays émergents, qui en est le point de départ. Il y a une dizaine d’années, l’explosion de l’art contemporain a conduit ces jeunes artistes à vivre en Occident. L’émulation due au marché a fait le reste. Certains sont devenus des stars internationales. D’autant qu’il n’est pas évident de trouver des artistes à développer ces valeurs esthétiques et intellectuelles qu’on retrouve au Maghreb, en Iran, en Inde, en Chine. Enfin, il n’y a pas de régions privilégiées. Mais il y a des cultures non européennes ou américaines qui proposent des choses très pertinentes dans l’art contemporain. (…)
Extraits de l’entretien « Jean-Gabriel Mitterrand, Dites simplement JGM ». Retrouvez le texte intégral sur diptyk n°7, octobre/novembre.
