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Sophia Fassi dans les pas des grands maîtres

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Pour cette jeune artiste franco-marocaine récemment diplômée des Beaux-Arts de Paris, la peinture est une manière de donner de l’importance aux choses simples. Ses portraits de proches ou d’inconnus croisés dans le métro figent avec poésie de banales scènes de la vie quotidienne.

C’est non pas dans son atelier, mais à la galerie Berthet-Aittouarès, à deux pas des Beaux-Arts de Paris dont elle est sortie diplômée en 2020, que nous rencontrons Sophia Fassi. La jeune peintre y expose pour la première fois ensemble des toiles qui, pour certaines, l’ont accompagnée pendant trois ans dans le salon parisien de ses parents. Depuis sa deuxième année d’étude, elle a fait de ce dernier son antre de création, à la fois grotte et cocon, qu’elle préfère à l’atelier partagé de l’École, ô combien moins tranquille. Elle y travaille et retravaille, patiemment, passionnément, les images qu’elle a collectées à la volée dans le métro avec son smartphone ou au gré de ses recherches sur Internet. Parfois aussi, elle invite ses ami(e)s pour de longues séances de pose.

Sophia Fassi, La Vénus de Transylvanie, 2023, huile sur toile, 89 x 146,5 cm. Photo © Bertrand Michau, ADAGP. Courtesy Galerie Berthet-Aittouarès

Sur la toile, elle commence par le dessin, père de toutes choses selon l’artiste, qui a appris de son professeur James Bloede à dessiner « à l’ancienne », sans projecteur ni mise au carreau. Puis viennent les couleurs, les gestes et la liberté du pinceau que permet la maîtrise académique. Son rêve ? Atteindre une perfection technique telle qu’elle parviendra à s’en détacher. Se détacher du modèle, de la règle, des images faites par d’autres, pour les doter de cette part de hasard contrôlé, d’autonomie des formes, de ce goût du jeu qu’elle admire chez Poussin, Rubens, Rembrandt, Gauguin, Titien, Tintoret, Ingres, Delacroix, Toulouse-Lautrec ou encore Lucian Freud…

Les images qu’elle collecte de manière intuitive ou recompose en atelier doivent beaucoup aux heures passées au Louvre à observer, dessiner, copier d’après les « grands maîtres », apprenant d’eux à « magnifier les choses toutes simples de la vie de tous les jours, auxquelles nous, les artistes, avons le pouvoir de donner de l’importance », explique-t-elle. Sophia Fassi se plaît aussi à explorer les journaux d’artistes pour comprendre leur vie pratique, ce qui se cache derrière leur manière, leur sens de la composition et leur goût pour l’art.

Sophia Fassi avec l’œuvre Baptiste au canapé Photo © Bertrand Michau, ADAGP Courtesy Galerie Berthet-Aittouarès

Regardant la peinture de Corot, elle y décèle une douceur qui dépasse les sujets représentés. Plus tard, elle apprend que le peintre, ami de Daumier, a offert à son comparse sans le sou rien de moins qu’une maison. La peinture dit toujours plus que ce qu’elle donne à voir immédiatement. Ce sont ces histoires dont Sophia Fassi cherche à rendre compte.

Dans ses tableaux, Sophia Fassi veut « qu’on sente l’histoire et les gens qu’[elle] représente ». Cette intention se traduit par un trait précis, une riche palette et une touche plus empâtée, vive et énergique, que délicate et minutieuse. Dans les plis de certaines étoffes, se dessinent parfois discrètement de fins motifs floraux qui semblent détonner au milieu des solides touches noires des fonds sur lesquels miroite subtilement la lumière. « Il faut bien sûr qu’il y ait un minimum de détails, quand cela sert l’histoire du personnage, mais les petites veines précieuses qui ressortent comme dans le classicisme, ce n’est pas du tout mon truc », affirme Sophia Fassi en riant. « Il faut jouer avec la matière de la peinture, voir la chair dans les mains, réussir à distinguer une chevelure noire d’une bassine de la même couleur ». Et cela ne peut passer que par le travail des textures, qu’elle prend tant de plaisir à recomposer. « C’est toute ma vie, la peinture. J’ai essayé d’autres voies, mais je ne suis bonne qu’à ça », conclut l’artiste. Un jeu sérieux auquel elle se prête le sourire aux lèvres.

Horya Makhlouf

Sophia Fassi, Gaïa endormie, 2023-2024, huile sur toile, 65 x 81 cm Photo © Bertrand Michau, ADAGP. Courtesy Galerie Berthet-Aittouarès
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