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[Work In Progress] Steph, une virtuosité de l’urgence

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Ovni visuel où la danse des corps et le rythme du montage vidéo participent d’une même chorégraphie, le clip Us du jeune chorégraphe Steph est un bijou de poésie. Et le signe d’une scène marocaine qui s’approprie la ville sans complexe.

La captation d’une pièce dansée peut-elle devenir une œuvre d’art à part entière ? C’est sans doute la prouesse réalisée par le jeune chorégraphe de Salé, Mustapha Es-Sabbah, alias Steph, dans son clip vidéo autoproduit Us. Cet autodidacte de 27 ans, appuyé par le réalisateur Adil Nakach, livre une chorégraphie d’une force graphique incontestable, notamment grâce au montage vidéo dont les décadrages viennent souligner les mouvements des danseurs sur une musique trip-hop de l’Australien Ta-ku.

Réalisé sur le toit d’un immeuble désaffecté à Casablanca, Us suit une tendance prégnante chez les jeunes créateurs marocains, génération spontanée qui contourne la difficulté de s’approprier l’espace public en investissant sans complexe des espaces urbains non conventionnels. « L’un des grands challenges était de réaliser cette pièce dans un endroit qui n’est pas forcément autorisé pour cela, avec les contraintes d’horaires liées au Covid-19″, confirme Steph. Une démarche qui rappelle l’univers minimaliste d’un Ismael Zaidy, qui photographie ses proches sur le toit de la maison familiale avec un sens aigu de la mise en scène. Faite dans l’inconfort du lieu clandestin qui confère à cette création la virtuosité de l’urgence, Us confine à la performance dansée, bien sûr, mais aussi à une performance visuelle aboutie.

Pour cette chorégraphie, Steph a voulu parler « d’amour, de jalousie, d’acceptation de soi et des autres ». Une tension entre l’individu et le groupe : dialectique vieille comme le monde mais qui prend aussi au Maroc une dimension essentielle. Danseurs et danseuses se toisent parfois et se rapprochent. Si Steph ne se revendique pas forcément d’un contexte marocain – la danse comme langage universel est son seul credo –, il y a assurément une liberté des corps qui prend une dimension quasi politique dès lors que le corps et le genre restent les derniers bastions de l’intime à libérer. Un bijou.

Emmanuelle Outtier

TA-KU - WE WERE IN LOVE | US | DIRECTION & CHOREGRAPHIE STEPH ES

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