KEHINDE WILEY FAIT SON BLACK REMIX

Kehinde Wiley, Saint-Jérôme,1912-1956, 2012, Maroc (Amine Bendriouich), Huile sur toile, 122 x 92 cm © Galerie Daniel Templon, Paris. Photo : B.Huet/Tutti

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Kehinde Wiley, artiste américain d'origine africaine représenté par la galerie Daniel Templon, repeint l'histoire de l'art au noir. Mais pas n’importe quel « Noir ». Il invite les jeunes black boys de la rue et de tous horizons à prendre la pose : celle des puissants, des nobles, des blancs… Wiley choisit ainsi de réhabiliter l'art du portrait et d’anoblir le ghetto.

par Julie Estève et Katia Feltrin

Dès 2006, ce diplômé de la prestigieuse Université de Yale se lance dans une grande fresque sociale autour du monde, « The World Stage : France 1880-1960 ». Wiley part alors en Afrique sur les traces des colonies françaises où il « caste » ses modèles directement dans la rue, et sacralise les invisibles de l'histoire de l'art. Il parcourt ainsi la Tunisie, le Cameroun et le Gabon, où il reste emprisonné pendant trois jours avec Barthélémy Toguo ! Il peint enfin les jeunes street boys du Maroc, où il fait notamment le portrait d’Amine Bendriouich, l’enfant terrible de la mode. Rencontre avec un artiste résolument engagé pour l’Afrique.

Tes peintures questionnent de multiples sujets : l’histoire, la politique, l’art du portrait classique et contemporain, le décor, l’identité, le genre… Mais surtout tu pars du postulat que tout le monde mérite d’être peint. Considères-tu ces portraits comme des peintures politiques ?

Mes peintures sont remplies d’éléments décoratifs, de couleurs saturées, de mises en scène audacieuses. C’est un moyen d’attirer l’attention, de hurler à la face du monde que les hommes doivent être considérés. C’est en effet une sorte d’acte politique, qui peut être vu comme une manière de placer la population Noire et de couleur dans l’espace visuel. Ces peintures aspirent à être vues. Elles demandent à être prises au sérieux, à être pleinement appréciées, à leur juste valeur. Les questions qui entourent le genre et l’identité sont un point-clé de mon travail, étant donné que beaucoup de mes toiles reposent sur des modèles floraux et décoratifs. Les notions de goût, de classe, de virilité entrent dans cette recherche sur le décor.

Le projet « The World Stage » a aussi été l’occasion de collaborer avec d’autres créateurs, notamment le Camerounais Barthélémy Toguo et le Marocain Amine Bendriouich. Peux-tu nous raconter ta rencontre avec ces deux artistes ?

J’ai rencontré Barthélémy Toguo à Paris, il y a quelques années, à l’occasion de l’une de ses expositions. C’est un artiste exceptionnellement doué et brillant. Je l‘admire beaucoup et je voulais vraiment le rencontrer, d’abord parce que je suis fan de son travail, mais également parce que nous partageons un lien, une connexion avec le continent africain. Nous avons commencé à parler de sa participation au projet « The World Stage », car il souhaitait comme moi mettre l’Afrique en valeur et renouveler la manière de représenter ce continent dans les arts plastiques. Nous avons commencé à parler des castings de rue en Afrique Centrale, étant donné qu’il est originaire de cette région. Barthélémy Toguo a été là à chaque moment, dans les hauts et dans les bas, et on doit lui dire un grand merci pour la réussite de ce projet.
 

Retrouvez l'intégralité de notre entretien avec Kehinde Wiley dans Diptyk n°19.

Actuellement en kiosque au Maroc

Bientôt disponible à Paris et au Festival des Rencontres d'Arles !

George Awde, Spotted, 2014, Dubaï
Kehinde Wiley, Portrait of a Couple, 1912-1956, Maroc, 2012, Huile sur toile, 243,5 x 182,5 cm © Galerie Daniel Templon, Paris. Photo : B.Huet/Tutti
Kehinde Wiley, The Three Graces, 1881-1956, 2012, Tunisie, Huile sur toile, 213 x 282 cm © Galerie Daniel Templon, Paris. Photo : B.Huet/Tutti