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L’impact esthétique de Bachir Demnati

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La Galerie Comptoir des Mines consacre un second solo show au peintre Bachir Demnati. Un défilé de variations formelles, à la hauteur de sa place d’honneur dans l’histoire de la peinture marocaine.

Ni snob, ni décadent, Bachir Demnati serait-il un esthète progressiste ? Sans doute. Et avec quelle joie ! Voilà un peintre dans la plénitude créatrice qui, en vingt tableaux comme vingt poèmes, revisite des chapitres de l’art islamique et un long siècle de modernité artistique, et se permet d’y procéder avec une palette restreinte. Un tableau en noir et blanc, plusieurs limités aux tons rouge, gris, noir et blanc, et un seul qui s’offre deux traits sublimes de bordeaux et de jaune. Avec si peu de couleurs, Demnati nous propose un carnaval de symboles en équilibre.

Apesanteur, 2022, acrylique sur papier marouflé sur panneau, 80 x 100 cm, Courtesy CMG

Un tropisme urbanistique articule les réminiscences figuratives. On croit voir des plans urbains, des routes, mais aussi des détails de façades, des intérieurs d’immeubles… Ceux de Tanger bien sûr, où il vit et travaille, mais aussi Assilah. L’architecte peintre qu’est Bachir Demnati déploie en fortes dominantes sur des grilles et des obliques le coufique, le tifinagh, le Bauhaus, les typographies japonaise ou coréenne et le style suisse. On retrouve évidemment la vitalité de l’École de Casablanca, celles du hard edge ou du suprématisme de Malevitch, comme l’évoque son galeriste Hicham Daoudi, à juste titre. Au fil du parcours qui nous fait évoluer entre mysticisme et plaisir calligraphique, on devine des corps en mouvement. Le leitmotiv le plus présent est un grand point rouge qui élève le regard. Il peut nous faire penser au soleil rouge japonais, à ceux du peintre Joan Miró ou encore au célèbre « soleil cou coupé » d’Apollinaire.

Avec ce nouveau solo show, Bachir Demnati provoque à nouveau la surprise élégante et l’impact esthétique que suscita son « Exposition (In)attendue » en 2018, et se renouvelle à travers l’usage exclusif de l’acrylique, plus humaine dans ses imperfections que ses anciens collages sur plexiglas. Servi par une excellente scénographie, l’ensemble brille de variété et d’audace. Et surtout de l’aura, cette distance qui s’empare de nous, suivant une des définitions de Walter Benjamin, grand penseur de l’art moderne. Bachir Demnati, persévérant, confirme sa place d’honneur au sein de la peinture marocaine.

Juan Palao

Bachir Demnati, Equilibrium, Comptoir des Mines, Marrakech, jusqu’au 15 juin.
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