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Balade arty à Tanger

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Pour sa troisième édition, le parcours artistique Être ici conviait le public à redécouvrir des lieux du patrimoine architectural et identitaire de Tanger, habituellement fermés et à rencontrer une cinquantaine d’artistes différents. 

 

« Sortir la culture de son cadre conventionnel et réactiver l’ADN artistique de Tanger », telle est la mission que revendique Anne Chaplain, l’une des fondatrices de l’association Ssilate, à l’origine du parcours artistique Être ici. Ce 16 septembre, des dizaines de bénévoles guident les visiteurs vers les cinq lieux ouverts ce jour-là. On se presse notamment à l’entrée de la prison du Méchouar, fermée définitivement depuis une cinquantaine d’années. Sur ses murs trônent, dans un vent impitoyable, des extraits de journaux redessinés par Thomas Henriot qui évoquent la figure du poète cubain Reinaldo Arenas, persécuté par le régime castriste pour son homosexualité. D’une prison l’autre, cette œuvre conçue à La Havane et imprimée sur soie, donne d’entrée de jeu le ton : « Dessiner à Tanger, c’est dépeindre l’autre côté du miroir, choisir l’envers du décor », commente Thomas Henriot. « Une même problématique de l’enfermement et du désir de partir par la mer rapproche ces deux villes », ajoute l’artiste qui travaille toujours in situ.

À l’intérieur, les plasticiens semblent plus inspirés les uns que les autres. Il faut dire que l’espace carcéral se prête à des questionnements divers. Avec une installation composée de fleurs de gypsophiles accrochées à des barreaux, Safaa Erruas explore l’ambivalence des lieux, entre espoir de délivrance et dureté de l’enfermement. Khadija Tnana, peignant à même les murs le martyr subi par la jeune Khadija, violée par des adolescents de son âge, s’interroge sur la prison à ciel ouvert que peut être parfois un pays. Youness Atbane, de son côté, détache d’une installation antérieure quelques fragments qu’il confronte à un lieu « abîmé et ayant perdu ses fonctions. » 

 

On retrouve alors Amina Rezki, au Borj Dar Baroud, qui nous présente ses installations dont l’une entoure un canon d’un immense filet rouge barrant l’horizon. À la question de savoir ce que représente une œuvre d’art éphémère, la plasticienne originaire de Tanger répond : « C’est de l’art pour l’art ! » Propos que contesterait sans doute le collectif ProDiGes de Rodez (France), invité pour l’occasion, lui qui prône « un art en bande organisée », constatant qu’aujourd’hui, « l’artiste contemporain est devenu un entrepreneur, mais ne le dit pas ». De quoi faire méditer le public tangérois.

 

Olivier Rachet

 

Parcours artistique Être ici, Tanger, 16 septembre 2018. Résidence d’Emily Keene et du Grand Chérif d’Ouazzane Sidi Hadj Abdeslam, Maison Jnan Kaptan, Prison du Méchouar, Tour du Ciel, Borj Dar Baroud. 

 

SOWAT, courtesy de la galerie David Bloch
SOWAT, courtesy de la galerie David Bloch
© Autoportrait
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