C’est un objet hybride mais intense que nous propose Samer Mohdad, photographe libanais. Un mélange troublant d’images et de bribes autobiographiques. L’artiste se dépersonnalise dans son récit à la 3e personne pour nous confier de manière sobre et pudique sa vision de Beyrouth de 1985 à 2012. Les photos qu’il réalise à la même époque pour l’agence VU complètent les textes avec ce même regard qui pourrait paraître distant, mais qui est plutôt une posture de l’artiste lui conférant un maximum d’objectivité. Car c’est là toute la difficulté du photoreporter : trouver la juste mesure entre empathie et devoir d’informer. On suit donc l’évolution de Samer Mohdad au gré de ses rencontres et de ses voyages, jusqu’à la création de la Fondation arabe pour l’image, en compagnie de Fouad el Khouri et Akram Zaatari, dont il finira par être écarté. Une épopée intime qui raconte en filigrane le destin plus grand d’un pays et de ses habitants soumis à des violences incessantes depuis trop longtemps.
Samer Mohdad, Beyrouth mutations. Editions Actes Sud, 224 pages, 35 euros