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Commencer une collection à Arco Madrid

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Pendant la 43e édition de la foire Arco, nous avons imaginé ce que pourraient être les choix d’un premier collectionneur qui trouverait dans ce marché unique de l’art moderne et contemporain de quoi alimenter une collection naissante. 

Avec ses 207 galeries en provenance de 36 pays différents, dont 73 sont espagnoles et 40 latino-américaines, la foire Arco, située en périphérie de Madrid, à quelques pas de l’aéroport, offre un panel d’œuvres modernes et contemporaines accessibles à tous les budgets. Pour qui voudrait débuter une collection, sans doute trouverait-il ici de quoi assouvir ses envies de premier achat que l’on imagine toujours plus ou moins compulsif. Mais par quoi se laisser guider ? Par les tendances du marché, sachant que la majorité des artistes représentés sont ici européens ou sud-américains ? Par la critique et les institutions dont le métier est aussi de spéculer sur les valeurs sûres de demain ? Ou plus simplement, par ses goûts personnels ? Collectionner commencerait peut-être par laisser parler ses coups de cœur.

Constatons tout d’abord que les Caraïbes ont aujourd’hui le vent en poupe. Après avoir consacré l’an passé un focus sur l’espace méditerranéen, la foire dédie une section aux galeries de l’océan caribéen. Curatée par Carla Acevedo-Yates et Sara Hermann Morera, l’exposition « The Shore, the Tide, the Current : an oceanic Caribbean » (Le rivage, la marée, le courant : une Caraïbe océanique) incite à scruter une scène qui s’intéresse au statut continental des Caraïbes, mettant en évidence « les relations coloniales entre archipels et continents, les alizés qui ont facilité l’expansion coloniale, les courants terrestres et souterrains qui facilitent les déplacements humains et non humains ». Passé une légère déception à la vue d’une exposition qui ne tient pas toutes ses promesses, notre premier choix se porte sur l’artiste américain d’origine portoricaine Juan Sánchez (Hutchinson Modern & Contemporary Gallery). Ses photographies argentiques en noir et blanc (environ 13 000 €) accompagnées de collages expriment à la fois le déracinement et la capacité à conjuguer plusieurs identités.

Des valeurs sûres

En écho à ce travail, nous nous arrêtons, dans le programme général, sur une série de l’artiste franco-haïtienne Gaëlle Choisne, nommée pour le prix Marcel Duchamp 2024 et représentée aujourd’hui par la galerie Air de Paris qui participe pour la première fois à Arco. Intitulée Safe Space for a passing History, ce travail hybride déclinant plusieurs formats (de 4444 à 25 555 €) réalisé à partir de céramique émaillée, de pierres précieuses, de cauris, mêlant peinture et collage, frappe par la dextérité avec laquelle l’artiste aborde la question des métissages. 

La galerie barcelonaise ADN propose, de son côté, des dessins d’Abdelkader Benchamma (20 000 €), autre nommé au prix Marcel Duchamp et des photographies (environ 7000 €) de la seule artiste marocaine repérée à la foire, Bouchra Khalili, dont The Wet Feet Series de 2012 aborde la question des migrations en provenance de Cuba et des Caraïbes vers Miami. Si les institutions peuvent légitimer les premiers choix d’un collectionneur, ne serait-il pas judicieux de parier aussi sur l’artiste Troy Makaza (Poggi) qui représentera le Zimbabwe lors de la prochaine Biennale de Venise ? Son œuvre sur silicone infusé de pigments (environ 22 000 €) mêlant habilement peinture et sculpture, invente ici son propre médium. Un artiste à suivre.

Farida El Gazzar, A Promise Kept, 2024, acrylique sur toile, 21 x 30 cm. Courtesy : Kalfayan Galleries

Pour tous les budgets

Continuant d’arpenter le hangar du Parc des Expositions Ifema, le collectionneur en herbe se laisse de plus en plus guider par le hasard des découvertes et par son goût de la peinture, largement représentée à Arco. Les peintures à l’huile de l’artiste franco-britannique Galina Munroe (Rafael Perez Hernando Gallery) attirent le regard par leur capacité à renouveler l’air de rien le genre du portrait, grâce à un travail de superposition de couches qui dit peut-être le passage du temps (entre 1200 et 12 000 € selon les formats). Les paysages oniriques de l’artiste gréco-égyptienne Farida El Gazzar (Kalfayan Galleries), dont les cadres ont été chinés dans des brocantes, séduisent par leur dimension nostalgique qui rappelle sa ville natale d’Alexandrie (environ 4000 €). Signe qui ne trompe pas, six de ses œuvres ont été vendues le premier jour de la foire. 

Last but not least, si cette 43e édition fait la part belle à la peinture, de rares séries photographiques retiennent notre attention et ne dépareraient pas dans une première collection : une série de l’artiste angolais Kiluanji Kia Henda, Inferno (Military Base, Namibe) chez la galerie lisboète Filomena Soares (12 500 €) ou une série déjantée de la performeuse et chorégraphe La Ribot, LaBOLA Prado  (Max Estrella) dans laquelle des danseurs investissent le musée madrilène dans un art de la performance qui secoue les consciences (coffret de 6 photos à 7000 €). Une idée de cadeau, peut-être aussi, histoire de « régaler » ses amis !

Arco, Ifema, Madrid, 6-10 mars 2024

Olivier Rachet

Galina Munroe, Familiar, Effortless, Exhaustive, 2023, huile et collage sur toile, 140 x 160 cm. Courtesy : Rafael Pérez Hernando Gallery
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