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LE SENS DE L’ACCUEIL

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Divisée en deux espaces aux portes de Paris, l’exposition «Persona grata» interroge la notion d’hospitalité dans les sociétés contemporaines. Quand le non-visible devient lisible.

 

Olivier Rachet

 

 

L’exposition « Persona Grata » est tout bonnement monumentale. Pas moins d’une centaine d’œuvres ont été sélectionnées parmi les collections permanentes du MAC VAL (Musée d’art contemporain du Val-de-Marne) et du Musée national de l’histoire de l’immigration, toutes en lien avec les questions de migration et d’accueil. Pour ce faire, les curateurs se sont alloués les services des philosophes Fabienne Brugère et Guillaume le Blanc, auteurs de La fin de l’hospitalité, dont les réflexions ponctuent le parcours. Redonner de la visibilité à ceux qui en sont dépourvus pose inévitablement la question du témoignage et du statut du document auquel de nombreux artistes ont recours. À l’image de la proposition du photographe Bruno Serralongue, concernant le camp de migrants de Calais auquel s’intéresse aussi le dernier lauréat du Prix Marcel-Duchamp 2018, Clément Cogitore, dans une fiction intitulée Parmi nous. Mais la question de la visibilité est aussi abordée de façon plus conceptuelle dans les travaux de Bruno Boudjelal ou Mathieu Pernot. Le premier s’intéresse au drame des harragas, « ceux qui brûlent leurs papiers » pour rejoindre la mer, à travers la série Les Paysages du départ, constituée de neuf tirages littéralement brûlés par une surexposition qui blanchit l’image. Le second photographie, dans Les Migrants, des réfugiés afghans endormis sur des bancs publics, le corps enfoui dans des sacs de couchage. 

Nombreux sont les artistes à avoir été confrontés, de près ou de loin, à l’épreuve de la migration et de l’exil. Fruit d’une résidence au MAC VAL, l’installation Suspendu de Mona Hatoum, constituée d’une quarantaine de balançoires sur lesquelles ont été gravées les cartes des villes dont sont originaires les habitants de Vitry-sur-Seine rencontrés par l’artiste, fait écho à l’installation de Barthélémy Toguo. The New World’s Climax III permet à l’artiste camerounais d’exprimer, à travers d’immenses tampons-bustes en bois, l’implacable dépersonnalisation administrative qui guette tout candidat à l’exil. 

 

TENDRE LA MAIN

L’exposition fait mouche lorsque le spectateur est pris plus ou moins directement à partie. « Pour tendre la main, écrivent les philosophes, il faut être deux. » Pour qu’une œuvre agisse, encore faut-il qu’elle soit vue et entendue. Et en la matière, rien de tel que l’humour et le burlesque pour bousculer les consciences. On retiendra deux œuvres d’une redoutable efficacité visuelle : celle de l’artiste iranienne Ghazel intitulée Urgent, qui détourne, dans des affiches iconoclastes, le modèle de la petite annonce pour rechercher un candidat à un mariage blanc. Une vidéo de Halida Boughriet, Action, montre, de son côté, l’artiste filmée à mi-corps tentant d’effleurer la main des passants qui oscillent entre rejet et indifférence. On s’amuse de leurs réactions, mais ne sont-elles pas aussi les nôtres parfois ?

 

«Persona Grata», Musée National de l’Histoire de l’Immigration, Paris, et MAC VAL, Vitry-sur-Seine, jusqu’au 20 janvier 2019.

 

Hicham Benohoud, Sans titre, 2013. Huile sur toile. Courtesy de L'Atelier 21
Hicham Benohoud, Sans titre, 2013. Huile sur toile. Courtesy de L'Atelier 21
A Bird’s Eye View, 2017, photographie digitale sur papier peint Courtesy de l’artiste et Kulte Gallery & Editions
A Bird’s Eye View, 2017, photographie digitale sur papier peint Courtesy de l’artiste et Kulte Gallery & Editions
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