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OMAR SAGHI, « LE PELERINAGE EST UN GRAND THEME POUR LES ARTISTES CONTEMPORAINS »

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Première exposition en France sur ce thème, l’Institut du Monde Arabe accueille après le British Museum « Hajj, le pèlerinage à La Mecque ». Diptyk a questionné l’écrivain marocain Omar Saghi, co-commissaire de l’exposition.

Propos recueillis par Alexandre Aublanc

 

Vous avez assuré le commissariat de l’exposition avec le Saoudien Fahad Abdulkareem de la Bibliothèque du roi Abdulaziz. Quel a été votre apport ?

Il a consisté à développer ensemble trois axes fondamentaux autour desquels s’articule le hajj(pèlerinage en arabe, ndlr)aujourd’hui et que nous avons tenté de transmettre à travers l’exposition : son universalité qui le relie au patrimoine immatériel mondial, où l’on retrouve des thèmes communs aux grands monothéismes ; l’expérience individuelle qui combine ferveur singulière et communion collective ; et enfin la contemporanéité du phénomène, La Mecque étant aujourd’hui une cité internationale.

L’exposition présente une grande variété d’objets anciens, manuscrits, cartes, tissus, et des œuvres plus récentes. Comment la représentation du pèlerinage a-t-elle évolué ?

L’islam est une religion peu propice à la figuration, notamment des rites religieux. Les artistes et artisans musulmans ont interrogé et contourné ce rapport à la figuration en peignant des miniatures qui représentent des caravanes de pèlerins en route vers la Mecque. Mais aussi des scènes imaginaires racontant le voyage espéré ou encore des calligraphies magnifiant le hajj… De leur côté, les souverains ont célébré les lieux saints en commandant des robes d’apparat, comme la kiswa qui recouvre la Ka‘ba, des ouvrages architecturaux le long des routes du pèlerinage, à la Mecque et Médine, ou encore des cartes. A côté de ces deux sources artistiques, savantes et politiques, il existe un univers d’art « naïf » ou « populaire » qui reproduit selon les techniques et les usages locaux de différentes cultures le « désir mecquois » des musulmans du monde.

 

Les artistes contemporains, arabes et saoudiens particulièrement, sont également présents. Quel regard portent-ils sur le pèlerinage ?

Si je prends l’exemple des photographes contemporains, comme les Saoudiens Reem al Fayçal et Ahmed Mater, ces derniers relient tous les aspects du pèlerinage en mêlant recherche artistique, regard sociologique, précision quasi-mathématique et interrogation conceptuelle. Le hajj est un grand thème pour les artistes d’aujourd’hui, parce qu’il rejoint les interrogations de l’art contemporain : comment figurer sans passer par la représentation, comment dire le rite sans le reproduire ?


Quelles démarches se dessinent dans le travail des artistes contemporains autour du hajj ?

Une partie des artistes présentés tissent des liens entre art occidental et hajj à travers les formes géométriques dominantes du pèlerinage : le cube, le cercle, la ligne droite et l’ellipse. C’est le cas avec Black Cube de Kader Attia, From God to Malevich de Babak Golkar ou encore White Cube de Walid Siti. D’autres interrogent les rites eux-mêmes et reconsidèrent le geste et le nombre, qui sont des données fondamentales de l’accomplissement des rituels, comme Ahmed Mater avec Pelt him !, sur la lapidation des stèles, ou Idris Khan avec l’installation Seven Times, qui renvoie à la Ka’ba et au tawaf (circumambulation, ndlr). Beaucoup de photographes, à l’image de Newsha Tavakolian et Kazuyoshi Nomachi, explorent aussi notre regard sur la Mecque et le hajj en se concentrant sur le tawaf autour de la Ka’ba, les pèlerins en ihram (vêtement de pèlerinage, ndlr)ou les foules à l’aéroport de Djedda.

A Londres, l’exposition a suscité des critiques en raison du fait qu’elle ne présentait que le point de vue officiel, celui de l'Arabie Saoudite, sur l'histoire du pèlerinage. Est-ce le cas à Paris ?

L’histoire du pèlerinage au xxe siècle est en partie une histoire saoudienne puisque les deux villes saintes de l’islam, La Mecque et Médine, sont gouvernées par le royaume d’Arabie saoudite depuis le milieu des années 1920. Néanmoins l’exposition indique la continuité des pouvoirs qui se sont succédés depuis l’ère préislamique dans la province du Hedjaz : les Ottomans, les chérifs de la Mecque alliés aux Anglais, les puissances occidentales et les projets lancés par les Saoudiens après 1925. Une grande section est aussi consacrée à la contribution française au hajj au cours du xixe siècle. La dimension politique du hajj est donc amplement présente.

 

(…) Retrouvez l'intégralité de cet entretien dans DIPTYK#23, bientôt en kiosque

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