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Plasticiens du Maroc, Poètes du Monde

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L’Espace d’art Société Générale réunit une centaine d’œuvres de peintres et plasticiens marocains pour les faire dialoguer avec des poèmes des quatre coins du monde.

 

« Comment inviter la poésie dans une banque, sortir les œuvres de leur coffre- fort ? » s’interroge Rim Laâbi, la commissaire de l’exposition « Plasticiens du Maroc, Poètes du Monde ». En privilégiant tout d’abord une centaine d’œuvres, sur plus de 800 visionnées, dont la beauté « coupe littéralement le souffle », selon les termes de cette plasticienne et théoricienne de l’art, et en les faisant dialoguer avec une cinquantaine de poèmes de tous les continents. L’approche privilégiée par la curatrice, secondée par le producteur de cinéma M’hammed El Kehal, est avant tout sensible : « Je ne voulais pas envisager le parcours comme une approche chronologique ou nominative. Je voulais une approche émotive des œuvres. » Le visiteur est invité, non à un parcours fléché, mais à une véritable déambulation poétique, une errance faite de rencontres aléatoires. Les poèmes sélectionnés n’illustrent aucunement les œuvres plastiques, mais tout ici entre en résonance et se confond « dans une ténébreuse et profonde unité », pour reprendre les mots de Baudelaire. « L’objectif, précise Rim Laâbi, était de créer une temporalité. Il fallait construire un rythme, une cadence. » Si certains rapprochements préexistaient à l’exposition, comme en témoignent les portfolios faisant dialoguer le poète français Yves Bonnefoy et Mehdi Qotbi ou le peintre palestinien Kamal Boullata et Mohammed Bennis, la plupart reste le fruit d’un long travail de préparation. Trois mois n’ont pas été de trop pour choisir les œuvres, créer une scénographie dont le visiteur serait partie prenante. C’est en découvrant, par exemple, la poésie sonore de Patrick Heidsieck, poésie à la fois physique et urbaine, que la curatrice a l’idée d’y associer la peinture de Cherkaoui et de Gharbaoui. Il s’agit, précise-t- elle, chez tous ces artistes, d’une « poésie concrète, mortelle, qui ne passe pas à côté de la réalité. » Parmi les huit espaces de l’exposition dont les titres renvoient souvent à l’idée de musicalité – « L’œil écoute », « Airs », « Ostinato » – l’un émeut sans doute plus qu’un autre. Intitulé « Souffles », en hommage à la célèbre revue artistique et littéraire dont on a fêté, en 2016, le cinquantenaire, cet espace délibérément conçu sur le mode de l’ouverture fait se côtoyer des œuvres somptueuses de Mohamed Melehi ou Mohammed Kacimi et des poèmes d’Abdellatif Laâbi. Cet espace, « c’est la mémoire de l’oubli » ajoute, tout en réserves, la curatrice. On conseillera aux visiteurs de rester tout ouïe pour écouter, ici une mélodie du compositeur Philip Glass sur laquelle le poète syrien Adonis récite ses propres vers ; là, le trio palestinien Joubran accompagnant une lecture de Mahmoud Darwich, dans une salle consacrée à Binebine. À la question de savoir s’il existerait une secrète analogie entre ces différents arts que sont la peinture, la poésie ou la musique, Rim Laâbi évoque une image, là encore sensible : « J’avais en tête pour cette exposition le regard d’un enfant quand il découvre quelque chose d’inattendu. À un moment, la pupille de son œil commence à vibrer. On voit alors la joie. »

 

Olivier Rachet

 

« Plasticiens du Maroc, Poètes du Monde », actuellement à l’Espace d’art Société Générale, Casablanca.

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