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Street photo – Le Maroc prend l’air !

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Souvent mal identifiée, franchement déconsidérée par les institutions et les galeries, la photographie de rue semble aujourd’hui un nouvel eldorado. Une route à suivre pour les jeunes photographes?

 

Faire des prises de vue dans la rue, c’est l’une des choses les plus difficiles pour un photographe au Maroc. Marocains ou étrangers, tous ont vécu ce baptême du feu. La photo de rue, c’est happer dans son objectif des visages, des lieux, des situations, pour dire quelque chose de cet espace commun qui commence à la lisière des intérieurs. Avec parfois, quelques faux amis. Car il ne suffit pas de photographier dans la rue pour faire de la street photography. Au Maroc, les enjeux de ce genre photographique sont loin d’être anodins. Le but avoué ? S’exprimer par tous les moyens. S’affirmer en tant que faiseur d’image, pour saisir librement des instants à la volée, dans un espace public où l’on tolère le cliché fabriqué par le pouvoir, les enseignes ou la publicité, mais pas celui qu’on peut créer soi-même. Au-delà de cet enjeu personnel, apposer son propre regard, on peut aussi y lire en filigrane un enjeu politique. Prendre possession du territoire public, c’est ouvrir des portes vers la critique sociale. Chacun peut constater les failles du système ou les petits miracles au milieu du chaos, mais qui en témoigne vraiment ? Les street photographers se donnent bien souvent la mission de les révéler, consciemment ou non.

 

Pas si nouveau

On semble découvrir ce vent de fraîcheur qui ose enfin arpenter le pavé marocain pour propulser la jeune photo en dehors de l’autobiographie et de la série hyperconceptualisée. Une mouvance vraiment nouvelle ? En réalité, la street photo a émergé il y a une quarantaine d’années au Maroc, marquant les débuts de la photographie contemporaine. Dans le premier album de photo édité au Maroc en 1974, Mohamed Benaissa concentrait son regard sur les rues d’Asilah à la recherche de son enfance. Il dit être « resté au seuil des intérieurs, sauf ceux qu’on [lui] a ouverts, par refus du viol ». Dans les années 80, Daoud Aoulad Syad commence à photographier son Maroc, celui du Sud et des manifestations populaires. La rue bien sûr, mais pas seulement. À l’époque, ses images d’un pays montré sans concession choquent l’opinion publique, qui l’accuse de misérabilisme. Aujourd’hui, une jeune génération a pris le relais.

 

Au delà d’une street photo heureuse et colorée aux accents parfois acides, comme celle de Yoriyas, des photoreporters comme Mehdy Mariouch et Yassine Toumi dressent une vision plus critique, aiguisée par leur conscience toute personnelle du sujet social. S’ils ont fait leurs armes dans la rue grâce à leur métier de photographe de presse, ils ont aussi développé des séries en parallèle. Mehdy Mariouch a par exemple saisi en pleine nuit des images des sans-abris de Casablanca, publiées ensuite par le magazine TelQuel sur internet. 

 

Une nécessaire exigence

En 2015, ils lancent Everyday Casablanca sur le modèle d’Everyday Africa, un fil d’images postées chaque jour pour montrer une autre Afrique, loin des clichés. Il est très vite alimenté par Abderrahmane Doukkane, Walid Bendra ou Salmane Dahioui El Idrissi… Cette jeune génération de Casablancais ne veut rien épargner au regard. Ni les disparités criantes, ni les instants de beauté suspendus de la Ville Blanche. Un fil que l’on a pu suivre avec intérêt sur Facebook et Instagram, mais auquel l’exposition récente de l’Institut français de Casablanca ne rend pas vraiment justice. Yasmine Hatimi et Zakaria Wakrim y détonnaient un peu. Leurs images sont en réalité une réflexion sur les manifestations de la jeunesse marocaine, pour l’une, et sur les espaces ruraux anarchiquement urbanisés pour l’autre. Des travaux à retenir, mais pas à mettre dans le panier de la street photography. (…)

 

Retrouvez la suite de cet article dans le numéro #37 de Diptyk Mag actuellement en kiosque

 

 

Dossier réalisé par Corinne Cauvin, Jeanne Mercier, Marie Moignard et Olivier Rachet

 

 

 

Mona Hatoum, Jardin suspendu, 2008, installation, sacs de jute remplis de terre et de graines
Mona Hatoum, Jardin suspendu, 2008, installation, sacs de jute remplis de terre et de graines
Mohamed El baz, Autopsie 1, 2013 ©Galerie l'Atelier 21
Mohamed El baz, Autopsie 1, 2013 ©Galerie l'Atelier 21
Mohamed El baz, Autopsie 3, 2013 ©Galerie l'Atelier 21
Mohamed El baz, Autopsie 3, 2013 ©Galerie l'Atelier 21
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