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Art Dubai, une édition brumeuse

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La foire Art Dubai a ouvert ses portes avec un public plus clairsemé que d’habitude. Plusieurs galeries ont passé leur tour, préférant participer aux éditions coïncidant avec la Biennale de Sharjah. Les groupes VIP de musées, eux, ont été réduits de moitié cette année.

Calme. Très calme. Telle était l’ambiance lors du vernissage de la foire Art Dubai qui s’est ouvert le 15 mars. Malgré le champagne, la sono et la techno de mise, la « bella figura » des organisateurs, le cœur n’était pas vraiment à la fête. C’est que la décélération mondiale n’épargne pas l’émirat. Bien que doté d’une économie plus diversifiée que ses voisins immédiats, le micro-État pâtit de la chute du baril de pétrole et de l’instabilité régionale. La crainte qu’inspire la poudrière du Moyen-Orient, couplée au fait que l’édition ne coïncide pas avec la Biennale de Sharjah, a fortement limité le déplacement des groupes de musées, deux fois moins nombreux que l’an dernier.

Aussi le commerce sur la foire reste-t-il bigrement en dents de scie, à l’aune d’ailleurs des bilans de Christie’s à Dubaï, divisés par deux entre 2010 et 2015. « Aucune galerie ne peut avoir un business qui tienne uniquement sur le marché local, qui est trop petit et saisonnier », confie Kourosh Nouri de la galerie Carbon 12 (Dubaï), qui a toutefois connu un démarrage engageant lors du vernissage. « On ne peut pas aller plus vite que la musique. On va déjà très vite », défend toutefois la galeriste Andrée Sfeir-Semler (Beyrouth, Hambourg).
 

Recentrage local


Si beaucoup d’enseignes occidentales ont levé provisoirement le camp, la foire s’est recentrée davantage sur sa saveur originelle moyen-orientale, africaine et asiatique et sur un public composé majoritairement d’Émiratis et d’Iraniens. On ne peut s’en plaindre car c’est là somme toute la force et la singularité d’Art Dubai.

Même si le niveau n’atteint pas le feu d’artifice de 2014, la qualité reste honorable, quoiqu’un brin trop sèche, voire rêche, dominée par un camaïeu de gris et noir trahissant l’humeur ambiante. Quelques stands sortent du lot, comme celui de la galerie Experimenter (Calcutta), dédié au dessin dans tous ses états, ou le solo show de Carroll/Fletcher (Londres) autour du duo Basel Abbas et Ruanne Abou-Rahme, lauréats du Abraaj Group Art Prize. Certaines enseignes occidentales persistent et signent, comme Lelong (Paris, New York), qui n’avait pourtant pas connu un baptême du feu très probant l’an dernier. 
 

Miracle dans le brouillard


De même, Sabrina Amrani (Madrid) ne désarme pas, tout en anticipant « une année de conversations longues ». Et par la force des choses, des ventes moins rapides. D’autres sont aux anges, comme Jeanne Bucher Jaeger (Paris), qui s’est vu réserver trois oeuvres d’emblée. « C’est mon meilleur démarrage depuis quatre ans », sourit Véronique Jaeger. La galerie Imane Fares (Paris), quant à elle, a vendu la moitié de son stand. 

Aussi ne faut-il pas vendre la peau de l’émirat trop vite. « Dubaï est une ville étonnamment résiliente, reconnaît William Lawrie, de la galerie Lawrie Shabibi (Dubaï). On avait prévu sa fin en 2008 et elle a rebondi. Dans le contexte actuel, c’est la meilleure option possible dans la région en termes de commerce, de culture et de lifestyle ». Les galeries situées dans des lieux reculés ou aux marchés compliqués en sont conscientes, d’où l’arrivée d’un nombre inédit de galeries indiennes comme Project 88 ou Chemould Prescott Road (toutes deux de Bombay), de retour après une pause de quatre ans. « Pour nous, c’est un gros effort de participer au salon, mais il nous faut des vitrines sur le monde, et lorsque nous avions participé à la section Marker voilà trois ans, nous avions bien fonctionné », confie pour sa part Odile Tevie, de la galerie Nubuke (Accra). De même, malgré la chute de 30 % du cours du dollar australien, la GagProjects (Adélaïde) reste fidèle au poste, avec un stand d’une grande sérénité dominé par le travail méditatif de l’Iranien Hossein Valamanesh. Le « miracle » de Dubaï n’est pas un mirage. Il est juste nimbé, plus que d’habitude, du brouillard qui plombe ses voisins… 
 


Art Dubai, Madinat Jumeirah, Dubaï, 

16-19 mars 2016
 

Roxana Azimi

Une première version de cet article a été publié dans Le Quotidien de l’art du 16 mars 2016. www.lequotidiendelart.com

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