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Cet autre Kacimi

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«Résistance» est une exposition capsule. Quinze œuvres sur papier de Mohammed Kacimi, quelques carnets et des textes montrent une facette peu connue de l’artiste disparu en octobre 2003: la plume est engagée et l’homme debout et indigné.

 

Mandaté par la famille de l’artiste pour gérer le fonds Kacimi, Hicham Daoudi, PDG d’AHM, a choisi d’éclairer une facette de cette œuvre magistrale tous les deux ans en octobre, respectant un rythme lent voulu par la femme et la fille de l’artiste. En réalité, ces expositions ont plutôt pour effet d’éclairer le présent.

En 2014, on découvrait un Kacimi africain, lors d’un événement performatif où des étudiants ivoiriens et sénégalais déclamaient des poèmes devant les toiles grand format. On se souvient aussi de ce texte écrit par l’artiste en 1997 (Suite africaine, Paris) : « L’artiste africain n’est pas seulement le représentant, le transmetteur de l’exotisme et des rites ancestraux qui alimentent les imaginaires en perte de sens. Le créateur en Afrique est le passeur de sa propre histoire avec tout ce qu’elle a de complexe, d’ascendant, de rituel, d’éclatant ». Cet automne qui voit fleurir l’art contemporain africain partout en Europe, sous forme d’expositions, de foires et d’hommages, donne plus que jamais raison à cette pensée kacimienne prophétique.
 

La marche de l’Afrique 


Cette année, un accrochage de papier plus intimiste fait la lumière sur l’activisme des années 90 et sur cette obsession de l’artiste pour les droits de l’homme et la responsabilité de l’artiste dans la société. Dans un courrier du 17 mars 1999 adressé par Kacimi aux organisateurs du Salon du Livre de Tanger on peut lire : « Je pense que nous sommes des résistants, du moins, ceux qui le peuvent, dans un monde où les valeurs, les habitudes, le sens des choses, changent tous les jours, la tombée des idéologies, des révolutions, la dominance de nouveaux systèmes totalitaires traduite par le néo-capitalisme sauvage… et un torrent d’autres problèmes. Et l’artiste repose de nouveau la question existentielle : Être artiste, c’est quoi ? » Eternelle question. Cette nouvelle expo essaie, à la lumière de quelques dessins, de donner la réponse de Kacimi à une question qui a hanté sa vie et sa carrière. 
 

Quinze œuvres ce n’est pas beaucoup. Et tant mieux. On prendra donc le temps de regarder des grandes réalisations sur papier, comme ce pastel dont le catalogue explique qu’il avait remporté le premier prix de la Biennale de Saint-Quentin en 1994. On regardera aussi quelques carnets de croquis montrant des projets d’installations. Ce sera sans doute le genre d’expo où il y aura autant à voir qu’à lire. Une tentative très « économe » au sens noble du terme pour entrer dans la vérité d’un artiste qui, dès les années 1990, a expérimenté des postures aujourd’hui largement partagées par les jeunes artistes. Comme cette expérience de travail aux côtés des ouvriers d’une usine de la SOMACA ou encore au plus près des internés de l’hôpital psychiatrique de Berrechid. 


Le catalogue, qui porte en 4e de couverture le logo de l’Organisation marocaine des droits de l’homme dessiné par Kacimi, reproduit les 15 œuvres auxquelles s’ajoutent des extraits de textes comme cette strophe du poème Shéhérazade et la guerre (Kacimi, 1993) : « Seule une nuit nous sépare
d’Hiroshima, de Nagasaki, de la Bosnie /
la trahison commence toujours
avec cette aube éternelle meurtrie. »


Meryem Sebti

 

«Résistance», galerie CMOOA, Casablanca, du 20 octobre au 5 novembre 2016

Ombre portée, poèmes d’Alain Gorius illustrés par Mohamed Kacimi, 1998, livre d’artiste, dessin originaux sur vélin d’Arches, 24,5 x 25,5 cm Collection privée
Ombre portée, poèmes d’Alain Gorius illustrés par Mohamed Kacimi, 1998, livre d’artiste, dessin originaux sur vélin d’Arches, 24,5 x 25,5 cm Collection privée
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