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DANS L’ATELIER DE YASSINE BALBZIOUI

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Artiste à multiples facettes, Yassine Balbzioui étonne autant par ses toiles grand format que par ses performances masquées qui interpellent de Dakar à Berlin. A quelques jours de sa prochaine exposition casablancaise il ouvre son atelier pour Diptyk et révèle, outre sa science de la peinture à l’huile, le fil conducteur d’un travail en apparence disparate : le masque et l’effet de surprise.

 

par Syham Weigant

Photo Fabrice Coiffard

 

C’est dans un joyeux désordre, dans le garage que son père traditionnel et taciturne lui a enfin confié, que vient de pousser l’atelier de Balbzioui, improvisé pour peindre les grandes huiles exposées en ce moment à la galerie Shart. Etonnant puisqu’il y a deux ans quand nous l’avions rencontré pour la première fois, son atelier temporaire était sis à la Source du lion, rue du Jura dans le quartier du Maârif.

« Je suis un SDF de l’atelier mais je prends goût à ce nomadisme, qui me permet de me débarrasser du superflu et de m’adapter, de rester frais, d’entamer une nouvelle page à chaque fois sans être entouré par mes travaux, habitudes ou un quelconque repère ».

Depuis deux ans, presque rien n’a changé mais en même temps presque tout. Son appréhension et la perception du public. Le talent, les surprises on n’en est qu’au début mais des ventes aux enchères aux curateurs les plus respectés du continent, l’intérêt pour le travail de Yassine Balbzioui est unanime.

Pour la galerie Shart, il prépare avec la même rigueur et le même trac son exposition. Alors qu’ailleurs on s’intéresse de prés à ses talents de performers et expériences hybrides, au Maroc, il ne montrera que des huiles, des aquarelles et des dessins.

 

Enfant de l’huile…

« La peinture à l’huile n’est pas facile. Il y a d’abord une cuisine. On ne peut pas improviser, cette technique n’accepte pas tout, contrairement aux techniques mixtes. Là, on ne peut pas tricher. C’est lourd, c’est gras, ça pompe toute notre énergie et j’aime cette difficulté…. Contrairement à l’acrylique encore jeune, l’huile a une histoire, elle permet de se placer dans la filiation des plus grands de l’histoire de l’art. On n’est pas artistes par accident : on est un enfant de l’huile ! »

 

De cette tradition classique au départ, tout comme sa formation à Casa _ avant qu’il ne se frotte à l’ultra contemporain aux Beaux-arts de Bordeaux _ il tire des scènes parfaitement interprétées. Le masque, accessoire récurrent y joue le rôle running gag loufoque et grotesque. Et les critiques de spéculer. Autoportrait ? Tentative de « dépasser la représentation mimétique du portrait » (Mohamed Rachdi) ? Volonté de proposer une échappée, la fenêtre de chacun de ces masques qu’il met en scène, laissée ouverte à nos propres histoires, avec la liberté d’imaginer qu’en dessous ce sont des visages plus familiers qui s’y dissimulent…

 

Mais aussi performeur contemporain

Pour la Biennale de Marrakech, il montrera une variation sur ces masques, sous forme de performance. Dans Grosse tête, qu’il a déjà montré à Dakar ou à Berlin, il se met presque en danger, fabricant et enfilant de manière saccadé des travestissements faciaux aussi grotesque qu’illusoires : cagoules, plâtres ou argiles, liquides, plastiques… la face de l’artiste se révèle de plus en plus monstrueuse.

 « C’est la métaphore d’une vie où l’on accumule et superpose différents visages jusqu’à se déformer. En même temps, cette tête comprend l’historique des différents personnages qu’on a dû jouer. » Cette pièce a interpellé Bonaventure Ndikung, l’un des brillants penseurs de notre continent installé à Berlin : « Cette grosse tête crée une entité mutante, il y a du désespoir dans cet ego qui croît comme une tumeur. »

Même intérêt de la part de Simon Njami qui a remarqué Balbzioui à Dak’art pour une œuvre totale. Il encourageait le public local à l’approprier des masques et une peinture à l’huile dans une situation performative que Njami saluait pour sa capacité à créer du « bien commun », thème de la résidence dans laquelle il intervenait. 

[…] Retrouvez l'intégralité de cet article dans Diptyk#21, aujourd'hui en kiosque.

 

Yassine Balbzioui, « Jeux d'enfants et autres histoires… »

Galerie Shart, Casablanca

jusqu’au 18 janvier 2014

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