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[EDITO #60] Un nouveau monde à forger

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Meryem Sebti, magazine Diptyk
Meryem Sebti, directrice de la publication et de la rédaction du magazine Diptyk

Ce numéro d’été prend le large et vous donne à lire des reportages de notre rédaction aux quatre coins du monde. Reports obligent, deux grandes biennales avaient lieu cette année à quelques semaines d’intervalle. De Venise à Dakar, nous avons pu mesurer le formidable essor des scènes contemporaines africaines et le souffl e qu’elles impriment au reste du monde.

À Venise d’abord, si les puissances du XXe siècle ronronnent dans le confort de leurs pavillons des Giardini, avec ici et là, certes, des succès remarquables, comme les États-Unis, le Royaume-Uni ou la Suisse, c’est dans les vieilles pierres sombres de l’Arsenale ou les bâtiments disséminés dans les anciens magasins que ça se passe et que se joue la visibilité des « outsiders » venus d’Afrique. Neuf pays cette année, contre trois en 2011 ! Tous les deux ans, un nouveau pays est la star de Venise. Après le Ghana en 2018, cette année l’Ouganda – qui remporte une mention spéciale pour sa première participation – et la Côte d’Ivoire faisaient sensation en prenant part aux grandes thématiques du moment. En ouverture du pavillon ivoirien, l’artiste féministe Laetitia Ky, dont les photos ont sauté sans transition des réseaux sociaux aux cimaises de Venise, se mettait en scène cheveux tressés, poings levés et utérus brandi, coiffée de sculptures capillaires militantes, expliquant que « le cheveu des Africaines est politique » !

Tout est politique dans l’art. On le confirme quelques semaines plus tard, dans l’effervescence de Dakar, à l’ouverture d’une édition intitulée « I’Ndaffa/Forger ». Ce qui frappe cette année, c’est la capacité de cette biennale panafricaine à fabriquer activement de nouveaux récits et des utopies actives autour de l’écologie, des migrations, de la restitution, du genre, du féminisme, de la réparation postcoloniale… On retiendra, dans ce palais de justice dakarois, l’émotion que suscite le peintre Roméo Mivekannin, qui reproduit des images coloniales dans lesquelles il substitue son visage à celui des modèles de l’époque, quel que soit leur genre, interrogeant la fascination qu’ont pu exercer « ces images volées, fabriquées par les Occidentaux pour les Occidentaux ».

Partout, cette matière grattée, collée, surimprimée. Ce sont tous ces nouveaux récits que nous livrons dans ce numéro intense et voyageur, récits nécessairement construits sur les décombres de ceux qui nous ont été imposés. Ils forgent aujourd’hui la matière d’un art contemporain africain adulé, convoité, nécessaire parce que réparateur.

Meryem Sebti,
Directrice de la publication et de la rédaction

Retrouvez le numéro 60 de Diptyk en kiosque ou sur notre e-shop, en format papier ou format PDF

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