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Ismail Isshaq, le nouveau prodige du Ghana

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À contre-courant de la tendance figurative, la peinture semi-abstraite de ce jeune artiste ghanéen suscite l’engouement des collectionneurs. En moins d’un an, le résultat de ses oeuvres aux enchères a été quasiment quadruplé.

La scène artistique ghanéenne suscite un intérêt de plus en plus fort, de plus en plus pressant. El Anatsui, Ibrahim Mahama ou Amoako Boafo ont ouvert la voie, contribuant à faire tomber les barrières entre l’art contemporain occidental et l’art africain. Les montants négociés pour leurs oeuvres a permis d’ajuster les niveaux de prix entre artistes occidentaux et artistes africains. Un succès dont bénéficient les jeunes artistes ghanéens comme Ismail Isshaq, né en 1989 à Accra où il vit toujours. Après avoir obtenu son diplôme du Ghanatta College of Arts and Design en 2012, il réalise qu’il lui faut désapprendre pour réapprendre, tout en ancrant son travail dans la culture sociale et les réalités politiques du XXIe siècle. Sa voie pour y parvenir : se centrer sur la figure humaine, vecteur naturel d’empathie, à travers une réduction majeure du sujet tendant vers un grotesque qui le fascine. En résultent des visages ultrastylisés aux accents naïfs, une peinture empâtée parsemée de collages et d’objets de rebut, une « semi-abstraction infantile » pour parler d’identité, de résilience, « du pouvoir et de l’espoir » et, selon les mots de l’artiste, « représenter les masses et défendre les sans-voix ».

À l’heure où les artistes africains émergents excellent sur la voie d’un portrait figuratif sophistiqué, les toiles d’Isshaq tranchent et se font remarquer. Elles s’exposent d’abord dans son Ghana natal puis à l’étranger : New York, Miami, Londres, Dubaï et Le Cap. En 2019, il est sélectionné pour le prix GUBA (États-Unis) visant à mettre l’accent sur les artistes influents du moment. Surtout, il expose aux côtés d’El Anatsui dans le cadre de l’exposition « Material Earth », co organisée par Christie’s et la galerie Efie à Londres. Deux ans plus tard, ses oeuvres déclenchent d’incroyables batailles d’enchères.

Ismail Isshaq, Facade 18, 2019, 152,1 x 126 cm. © Sotheby’s - vendu 201 600 $

Deux ans pour s’imposer

Après « Material Earth », Christie’s attise la flamme des collectionneurs en publiant sur son site Internet un article consacré au Ghana (« The eyes of the art world are on Ghana right now, and they like what they see »). L’occasion d’interroger Kwame Mintah, cofondateur de la galerie Efie, sur l’intérêt grandissant que suscitent les artistes ghanéens auprès du monde entier. Les raisons évoquées de ce succès passent par le gain de visibilité extraordinaire de la Biennale de Venise de 2019, mais aussi par le fort développement du maillage artistique et commercial d’Accra, où sont implantées la majorité des galeries, notamment la Gallery 1957 qui a vraiment changé la donne pour l’art au Ghana. Cette puissante galerie compte trois espaces dans la ville. Le principal, stratégiquement situé au sein d’un hôtel cinq étoiles « où séjournent des représentants du gouvernement, des hommes d’affaires et d’autres personnalités importantes », a donné un énorme coup de pouce à la scène artistique locale.

Ismail Isshaq, Head 13, 2020, acrylique sur toile, 152,4 x 127 cm. © Sotheby’s - vendu 252 000 $

Il se trouve qu’Ismail Isshaq est défendu par la Gallery 1957 – qui a aussi ouvert un espace à Londres en 2020 – en plus de sa galerie dubaïote Efie. Le jeune artiste n’a donc pas eu besoin du soutien d’une grande galerie londonienne ou new-yorkaise pour rayonner. Bien sûr, Christie’s a joué un rôle essentiel en faisant résonner le nom d’Ismail Isshaq dans son puissant carnet d’adresses. En 2021, la première toile vendue par Christie’s, Epoch I (2018), a terrassé une estimation proposée autour de 13 000 $ pour s’arrêter à 131 000 $ (vente en ligne Christie’s Londres, octobre 2021). À l’issue de l’année 2021, les sept oeuvres d’Isshaq présentées aux enchères avaient généré un million de dollars. Fin octobre 2022, 40 oeuvres se sont déjà vendues par le biais des enchères, pour un montant de 3,7 millions de dollars. En moins d’un an, son résultat sur le marché international des enchères a quasiment été multiplié par quatre ! Un succès fou, confirmé par la réception de ses toiles à 1-54 Londres, à l’issue de laquelle la Gallery 1957 rapportait avoir très rapidement vendu les dix oeuvres d’un solo show dédié à l’artiste…

Par Céline Moine, Artmarket by Artprice.com

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