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RENCONTRE – AGNÈS B RACONTE KADER BENCHAMMA

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Agnès b, collectionneuse, mécène, créatrice de mode… nous conte sa rencontre émerveillée avec l’œuvre de Kader Benchamma, une œuvre fascinante qu’elle expose en avril à Paris à la Galerie du Jour.

A quand remonte votre rencontre avec l’œuvre de Kader Benchamma ?

En 2005, Jean-François Sanz me montre un carnet de dessins de Kader Benchamma, une autoédition qui m’a tout de suite émerveillée. C’était au moment où nous voulions monter une exposition collective sur le dessin. Nous l’avons donc invité. Il a réalisé alors un magnifique wall-drawing sur les colonnes et le plafond et a pris beaucoup de risques. Ensuite, je n’ai jamais cessé d’être éblouie par la richesse de son imaginaire. On a publié des petits cahiers, un livre, réalisé des T-Shirts ensemble. Je le trouve très doué, sensible. Il a de l’humour et en même temps son travail est très grave. Il nous emmène dans son monde. Il doit venir au printemps faire un wall-drawing dans ma maison à Louveciennes, une vieille maison que j’adore. Kader Benchamma a beaucoup de classe. On le sent à fleur de peau comme ses dessins.

Kader Benchamma m’a dit qu’il réalisait une sculpture pour leMathaf Arab Museum of Modern Art. Que pensez-vous de ce passage du dessin à la sculpture ?

Kader Benchamma est très attiré par les volumes dans ses dessins. Il a déjà fait une sculpture dont j’ai fait l’acquisition. Son passage vers la 3D me paraît très naturel.

Quel sera le titre de son exposition à la Galerie du Jour en avril ?

Il n’y en a pas pour l’instant. Le catalogue devrait s’intituler Dark Matter [matière sombre]. Kader Benchamma s’intéresse beaucoup à l’astrophysique, aux théories sur la matière, aux trous noirs, tout ce qui peut faire basculer le réel dans une autre dimension. Son œuvre offre une dynamique proche du rêve. Elle nous transporte. Kader Benchamma essaie de représenter des choses qu’on a du mal à imaginer. Et sans esquisse. J’ai l’impression qu’il découvre son inconscient en même temps qu’il dessine.

On dit que le Maroc est votre deuxième pays. Quand y êtes- vous allée pour la première fois ?

J’ai commencé à aller au Maroc pour une société. On y faisait faire des vêtements, on les faisait teindre. Je trouve toujours des occasions pour y aller. Je n’ai pas de maison là-bas. Je préfère aller un peu partout. A la demande d’un architecte japonais, j’ai décoré les parties communes d’une grande tour d’Osaka entièrement à la marocaine. Au début je pensais qu’il refuserait. Pas du tout. Je suis alors allée à Marrakech choisir les carrelages, les fauteuils, les lampes… Je voulais que tout vienne du Maroc. J’ai fait aussi des T-shirts “Vive le Maroc”. C’est une culture qui me parle tellement, un très beau pays qui nourrit tous mes sens.

A quand remonte votre dernier voyage au Maroc ?

Récemment je suis allée à Tanger invitée par la princesse Lalla Hasna pour une manifestation sur l’écologie. Elle m’a demandé de parler de notre bateau, le Tara, qui fait le tour du monde en analysant le plancton dans divers endroits du globe, le premier stade de la chaîne alimentaire. Je suis aussi la marraine de la cinémathèque de Tanger. J’apporte un soutien financier à la structure qu’Yto Barrada a créée, certaine que des talents vont éclore de cette initiative. Par ailleurs, une collaboration est aussi à l’étude avec l’Institut français de Marrakech.

Le Maroc est-il une source d’inspiration pour vous ?

Je suis en train de monter un film, un journal vidéo sur le Maroc que j’aimerais présenter au Festival du cinéma de Rotterdam. La diversité du paysage marocain me fascine : Chaouen et son bleu qui remonte les ruelles et se mêle au plâtre, Ouarzazate, Essaouira, la Vallée des Roses et sa coulée verte. J’adore me promener dans la casbah de Tanger. L’artisanat, les savoir-faire m’émerveillent. Il y a une grande richesse de création au Maroc qu’il faut préserver absolument.

A quoi rêvez-vous aujourd’hui ?

Je pourrais vivre au Maroc dans une cabane. Je suis très contente qu’on fabrique nos jeans là-bas à Fès et Casablanca. Cela nous donne l’occasion d’y aller.

J’ai besoin de dire du bien du Maghreb en ce moment. Je me bats contre l’amalgame qu’on peut faire entre islam et islamisme. Comment peut-on banaliser des choses aussi violentes que le racisme ? Ici, rue Dieu à Paris, il y a vingt-quatre ethnies différentes. C’est ça la richesse de la maison, la « pollinisation du monde » dont parle mon ami Edouard Glissant. Voilà ce que j’aimerais défendre à tout prix aujourd’hui. Chaque jour est un cadeau, je vis dans l’instant. Là je suis déjà en 2012. Je suis obligée de me projeter dans l’avenir avec les collections. J’adore le futur. Je fais mon travail avec passion. La fondation agnès b. défend trois axes : l’artistique, l’humanitaire, l’écologique. J’aimerais ouvrir ma fondation en banlieue nord-parisienne. Les jeunes là-bas sont presque tous au chômage. Il faut faire quelque chose, partager les richesses, que le XXIe siècle soit un siècle de partage.

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