L’exposition Picasso du musée Mohammed VI offrira une expérience inédite

Coline Zellal, conservatrice au Musée Picasso à Paris, évoque l’exposition qu’elle prépare pour le Musée Mohammed VI et qui sera inaugurée en avril.

Quel sera le parti pris curatorial de l’exposition Picasso au Musée Mohammed VI ?

L’idée de cette exposition et de donner un aperçu riche et vivant de l’œuvre de Pablo Picasso, de ses années de jeunesse jusqu’à ses dernières créations. Picasso est un artiste qui s’intéresse, tout au long de sa vie, à la question de la représentation et plus particulièrement à la figure humaine. Le parcours que nous proposons est chronologique, mais aussi centré sur un thème en particulier, l’artiste et son modèle, qui traverse, tel un fil rouge, toute la vie et tout l’œuvre de Picasso.

Quelles œuvres emblématiques seront présentées ?

Nous souhaitons, à travers cette exposition, faire dialoguer les styles et les périodes. La question du portrait et de l’autoportrait est centrale pour le thème que nous abordons et sera traitée autour de plusieurs chefs-d’œuvre du Musée national Picasso-Paris, de la période cubiste aux dernières années, en passant par les portraits classiques des années 1920 et les compositions des années méditerranéennes.

L’œuvre de Picasso est extrêmement protéiforme, sur quels aspects de sa production insisterez-vous ?

L’exposition veut mettre l’accent sur la pluridisciplinarité et montrer côte à côte peintures, sculptures et arts graphiques. Aucune période n’est privilégiée par rapport à une autre et c’est justement sur la grande diversité de l’œuvre de Picasso que nous souhaitons insister. Au cœur du propos, nous avons placé la question essentielle des processus créatifs. Le thème de l’artiste et du modèle est une constante dans l’œuvre de Picasso. Il constitue un véritable prisme à travers lequel on peut se pencher sur une grande pluralité de techniques et sur la définition même de l’œuvre d’art.

Au-delà des Demoiselles d’Avignon, quelle était l’influence de l’art africain sur l’œuvre de Picasso ? Comptez-vous la mettre en avant ? Comment ?

L’influence de l’art africain est essentielle pour comprendre tout un pan de l’œuvre de Pablo Picasso et concerne d’ailleurs plus largement un grand nombre d’artistes d’avant-garde au tournant des XIXe et XXe siècles. Elle va en effet bien au-delà des Demoiselles d’Avignon. Picasso collectionne tout au long de sa vie des œuvres d’art africain ; elles constituent pour lui un véritable laboratoire de formes qu’il observe, jour après jour, dans ses ateliers. À travers notre exposition, nous souhaitons parler en détail de cette influence, qui est particulièrement nette au cours de la période cubiste, puisque la façon dont Picasso réinvente la représentation de la figure humaine est alors très liée à cet art qu’il découvre au début du siècle.

Pourquoi est-ce important aujourd’hui de montrer Picasso à Rabat ?

Cette première exposition de l’œuvre de Pablo Picasso au Maroc constitue un événement fort, à la fois en termes d’histoire de l’art et d’histoire des expositions. Elle s’insère dans la manifestation culturelle internationale « Picasso-Méditerranée » qui se tiendra du printemps 2017 au printemps 2019, à l’initiative du Musée national Picasso-Paris, et qui réunira plus de soixante institutions autour d’une programmation centrée sur l’artiste. Pablo Picasso traverse presque tout le XXe siècle et a influencé des générations entières d’artistes. Montrer son œuvre au Musée Mohammed VI d’art moderne et contemporain, deux périodes de l’histoire de l’art entre lesquelles Picasso est un lien essentiel, est un projet qui fait sens. Plus largement, cette exposition, en s’insérant dans la manifestation « Picasso-Méditerranée », veut offrir une expérience culturelle inédite et resserrer les liens entre toutes les rives de la Méditerranée.